Guy Lefranc est de retour, pour une aventure très lointaine, périlleuse et aux enjeux politiques : ce qui n’est pas la première fois. Naturellement, cette régate lui réserve de graves imprévus et, tout aussi certainement, le journaliste déploiera tout son courage et sa compétence pour sortir par le haut de la situation. Il se joint à Théa, une bonne amie — sans qu’une relation plus intime soit même suggérée — pour faire partie d’une des équipes concourant lors de cette course maritime autour du globe. Et le reportage qu’il en tirera sera destiné à son journal : Le Globe, justement. Pesant sur ce contexte, le père de Théa (Van Toor) est un homme d’affaires international qui vend du minerai et le fait convoyer en Indonésie. Tous les protagonistes vont converger vers cette zone sensible, indépendante depuis peu, et très convoitée. Un album d’une excellente équipe d’auteurs, à l’action soutenue, et à lire au premier degré.
Lire la suite...Birmanie : état des lieux…

En Birmanie, l’élection Aung San Suu Kyi avait suscité bien des espoirs, déçus, terriblement déçus. Et ce n’est pas Fréderic Debomy, spécialiste du pays, qui peut penser le contraire. Avec Benoît Guillaume, il a déjà publié « Birmanie : fragments d’une réalité » (Cambourakis, 2016). Avec ce nouvel album (dont les 30 premières pages sur près d’une centaine ont été publiées dans la revue XXI, à l’automne 2018), ils font un état des lieux, notamment sur la situation de la minorité rohingya, des musulmans ultra minoritaires maltraités et poussés à l’exil.
L’album commence par évoquer cette situation devenue paradoxale aux yeux du monde : celui de Aung San Suu Kyi, femme dissidente réputée, Prix Nobel de la paix, dont le silence vis-à-vis de la situation des rohingya, prouve qu’elle est foncièrement islamophobe. Conséquence, discriminé et persécuté, le peuple Rohingya a été obligé de fuir et de se protéger en Thaïlande.
Les deux journalistes dont l’enquête est compliquée car les autorités veillent et le poids des militaires reste non négligeable, partagent les témoignages accablants qu’ils ont recueillis, notamment ceux concernant ces moines bouddhistes extrémistes et influents qui ne sont pas derniers à soutenir ce racisme d’État. De l’étranger ou de l‘intérieur, certains voient désormais en elle une dictatrice démocratiquement élue, certes, mais nationaliste forcenée s’appuyant sur les bouddhistes. Qui plus est, la majorité qui a élu Aung San Suu Kyi estime que, pour des questions d’identité, elle a des droits sur la minorité. Dès 2015, on a tout fait sur place pour que les Rohingya ne participent pas aux élections.
Au-delà de l’intolérance politique et religieuse, au-delà du nettoyage ethnique, les auteurs s’intéressent également au sort des femmes birmanes. La religion bouddhiste les discrédite ouvertement, attribuant même aux hommes une force spirituelle (le phon) dont les femmes seraient incapables ! Difficile, dans ce cas, d’être une Birmane libre et indépendante. Pour en savoir plus sur ce point, il suffit de lire l’article « Vision et place de la femme dans la société birmane ».
Les auteurs dressent donc de la société birmane un bilan documenté, clairement raconté, et globalement négatif, porté par les dessins surprenants de Benoît Guillaume. Il faut en effet un petit moment pour s’habituer et entrer dans son univers graphique. Au pinceau et en couleurs, l’auteur contoure les visages, les personnages, esquisse les décors à la manière d’un carnet de voyage au dessin spontané. Deux gammes de couleurs bleu/jaune pour le récit « en direct » et rouge/jaune pour les récits évoquant le passé. À noter que nombre de paysages mêlant rouge, jaune et noir sont rendus avec un impressionnisme très séduisant.
Didier QUELLA-GUYOT ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
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« Aung San Suu Kyi, Rohingya et extrémistes bouddhistes » par Benoît Guillaume et Frédéric Debomy
Éditions Massot (21,90 €) – ISBN : 978-2-3803-5236-8