Guy Lefranc est de retour, pour une aventure très lointaine, périlleuse et aux enjeux politiques : ce qui n’est pas la première fois. Naturellement, cette régate lui réserve de graves imprévus et, tout aussi certainement, le journaliste déploiera tout son courage et sa compétence pour sortir par le haut de la situation. Il se joint à Théa, une bonne amie — sans qu’une relation plus intime soit même suggérée — pour faire partie d’une des équipes concourant lors de cette course maritime autour du globe. Et le reportage qu’il en tirera sera destiné à son journal : Le Globe, justement. Pesant sur ce contexte, le père de Théa (Van Toor) est un homme d’affaires international qui vend du minerai et le fait convoyer en Indonésie. Tous les protagonistes vont converger vers cette zone sensible, indépendante depuis peu, et très convoitée. Un album d’une excellente équipe d’auteurs, à l’action soutenue, et à lire au premier degré.
Lire la suite...Après l’heure, c’est plus l’heure ! Est-ce à dire que même l’amour n’attend pas ?

Le temps ne compte plus pour David Ratte : et l’auteur du « Voyage des pères » n’arrête pas ! Après son excellent « Ma fille, mon enfant » paru l’an passé (et en attendant le premier tome de « Réfugiés climatiques & castagnettes » qu’il réalise seul), il récidive avec un nouveau et émouvant one-shot, cette fois-ci situé dans le Paris de 1905 : une très belle histoire d’amour, doublée d’un captivant chassé-croisé, où il adopte une ligne claire minutieuse et expressive, lorgnant sur l’ambiance magique des films d’animation de Paul Grimault : « Le Petit Soldat », « La Bergère et le Ramoneur », « Le Roi et l’Oiseau »…
Les scénaristes Jack Manini et Hervé Richez, eux, s’inspirent plutôt de certains longs métrages avec de véritables acteurs pour raconter le récit de ce rendez-vous manqué entre deux amants pourtant prédestinés à s’aimer. Ainsi, se sont-ils amusés à disséminer des références aux « Demoiselles de Rochefort » de Jacques Demy (avec Catherine Deneuve et Françoise Dorléac) ou à « Un jour sans fin » d’Harold Ramis (avec Bill Murray et Andie MacDowel) : « Au départ, nous avions l’envie commune de parler des merveilleux petits métiers oubliés de Paris. En travaillant le sujet, Jack est tombé sur le métier de canonnier de la tour Eiffel. Évidemment, cela a éveillé notre attention et notre envie… » explicite Hervé Richez, par ailleurs responsable éditorial du label Grand Angle dans le groupe Bamboo.
En effet, au début du XXe siècle (entre 1900 et 1907, précisément), c’érait un coup de canon tiré depuis le deuxième étage de la tour Eiffel qui donnait l’heure aux Parisiens : il annonçait ainsi quand il était midi pile, ce qui aurait contribué à la création des expressions populaires « midi pétante » ou « sur le coup de midi ». Donc, il n’était pas question, pour le canonnier en titre, de manquer le rendez-vous. Mais quand ce dernier fait un malaise, il faut bien trouver quelqu’un d’autre en urgence… Camille, sculpteur des marionnettes dont le spectacle ravit un public d’enfants ébahis sur le parvis de la Grande Dame, et qui est aussi ancien artilleur de l’armée, se révèle être l’homme de la situation…
Seulement, voilà… Alors qu’il arpente les rues de la Capitale à la recherche de bouts de cigares pour les revendre (ceci pour afin d’assurer sa pitance, car fabricant de marionnettes ne nourrit pas vraiment son homme !), il croise incidemment la sémillante et jolie Valentine qui, elle, vend le lait de son ânesse : à cette époque, ce liquide biologique, utilisé par ailleurs comme produit cosmétique, remplace à bon escient le lait maternel pour nourrir les bébés. Et c’est le coup de foudre ! Les amoureux se promettent alors de se retrouver le lendemain au son du canon de midi. Mais comment Camille va-t-il assurer, à la fois, son rendez-vous galant avec l’amour de sa vie et remplacer, au pied levé, le canonnier de la tour Eiffel défaillant, comme il l’a malencontreusement promis ?
Avec son complice Hervé Richez, Jack Manini (le scénariste de « S.O.S. Lusitania », « La Fille de l’exposition universelle », « La Guerre des amants », « Hollywood », « La Loi du Kanun », « Catacombes »…, mais aussi dessinateur de « Necromancy », « Estelle », « Mycroft Inquisitor »…), nous livre un sensible et cocasse récit romantique dans le Paris de la Belle Époque. À noter qu’il s’agit là du premier tome, très bien documenté, d’une série consacrée à la tour Eiffel, dont toutes les histoires seront autonomes les unes par rapport aux autres.
Gilles RATIER
(1) Voir : Le racisme ordinaire dénoncé à travers une relation mère/fille dans le nouvel album de David Ratte…. « Le Canonnier de la Tour Eiffel » par David Ratte, Jack Manini et Hervé Richez
Éditions Grand Angle (15,90 €) — EAN : 978-2-8189-7686-9