Par les temps qui courent, il est rare qu’un éditeur se lance dans une saga aux allures classiques prévue en plusieurs volumes. Pourtant, Futuropolis a déjà financé les scénarii des six ouvrages nécessaires à l’épopée de « L’Ange corse », lesquels sont d’ores et déjà écrits, et les trois premiers opus sortiront en l’espace d’une seule année… Rien que pour cela — mais pas que… —, saluons la parution du premier tome de « L’Ange corse » : l’histoire d’un orphelin corse qui doit s’expatrier dans l’Indochine des années 1930, pour échapper à une vendetta. Le jeune insulaire est recueilli, à Saigon, par un riche commerçant et propriétaire terrien natif d’Ajaccio : mais sous sa façade respectable, cet homme, bien installé, trempe dans le proxénétisme et le trafic de stupéfiants…
Lire la suite...« Un tout petit bout d’elles » par Raphaël Beuchot et Zidrou

Une grande partie de l’Afrique noire et de l’Afrique de l’Est est concernée par une barbarie sans nom : les mutilations génitales féminines (excision, infibulation…). C’est ce sujet qu’abordent Zidrou et Beuchot dans ce « Tout petit bout d’elles », euphémisme joliment poétique pour désigner l’organe du plaisir féminin mis à mal par des traditions insupportables…
Au Congo, de nos jours, un ouvrier chinois, Yue Kiang, s’est amouraché d’Antoinette, une belle Congolaise déjà maman d’une petite Léontine. Une communauté asiatique importante vit en effet dans des baraquements en marge d’une concession forestière isolée dont le patron voit d’ailleurs d’un très mauvais œil les relations avec les autochtones. Yue Kiang n’en a cure et retrouve régulièrement Antoinette finissant par découvrir le secret, intime, honteux, que des femmes infligent aux fillettes pour respecter la « coutume ». Antoinette pourra-t-elle épargner à sa petite Léontine cette infâme « blessure », humiliante et traumatisante à vie ?
Le sujet n’était sûrement pas facile à traiter puisqu’il fallait non seulement l’aborder d’un point de vue documentaire (un dossier très complet et très concret traite du phénomène en fin d’ouvrage), mais aussi en faire partager l’horreur par le biais de personnages suscitant l’empathie, le tout sans mièvrerie ni faux-semblant. Les auteurs ont donc fait le choix de dialogues adultes assez crus quelquefois, lors de conversations d’ouvriers par exemple, alternant avec des séquences plus sensibles ou émouvantes. Pour ne pas enfermer l’histoire dans ce seul sujet, ils ont élargi le récit à l’exploitation excessive des forêts et surtout à la vie quotidienne africaine : les maisonnettes, les rues terreuses, les petits commerces, les proverbes aussi…
Zidrou considère qu’il s’agit là de la fin de sa trilogie africaine commencée avec « Le Montreur d’histoires » et poursuivie avec « Tourne-disque », deux titres tout aussi réussis et savoureux que l’actuelle parution (voir nos chroniques sur BDZoom.com : « Le Montreur d’histoires » par Beuchot et Zidrou et « Tourne-Disque » par Raphaël Beuchot et Zidrou).
Comme l’Afrique colle à la peau de Zidrou, ce dernier n’a pu s’empêcher de l’inviter dans « L’Adoption », le tout nouvel album réalisé avec Arno Monin qui évoque la relation qui s’installe peu à peu entre un « grand-père » et l’enfant adopté par son fils (voir « L’Adoption : Qinaya » T1 par Arno Monin et Zidrou). Éblouissant de justesse et de sensibilité, ce premier tome du diptyque met en scène de temps à autre un restaurant africain, « Le Sénégal », où des septuagénaires ont leurs petites habitudes…
Alors, « bon » voyage !
Didier QUELLA-GUYOT ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).
http://bdzoom.com/author/didierqg/
« Un tout petit bout d’elles » par Raphaël Beuchot et Zidrou
Éditions Le Lombard (17, 95 €) – ISBN : 978-2-8036-3581-8
« L’Adoption T1 : Qinaya » par Arno Monin et Zidrou
Éditions Grand Angle (14, 90 €) – ISBN : 978-2-81893-603-0
Incroyable qu’une Bd parle de cette pratique !
Merci pour votre article ! En parler c’est le début du combat …
Plasticienne engagée, j’ai réalisé une œuvre intitulée « Infibulation » sur le sujet des mutilations sexuelles féminines que j’ai pu présenter à 400 lycéens français pour la Journée des Femmes 2018. L’action est aussi la pédagogie et le débat.
A découvrir : https://1011-art.blogspot.fr/p/blog-page.html
Mais aussi une oeuvre plus pudique intitulée « Noli me tangere » sur l’inviolabilité du corps de la femme : https://1011-art.blogspot.fr/p/noli-me-tangere.html