Guy Lefranc est de retour, pour une aventure très lointaine, périlleuse et aux enjeux politiques : ce qui n’est pas la première fois. Naturellement, cette régate lui réserve de graves imprévus et, tout aussi certainement, le journaliste déploiera tout son courage et sa compétence pour sortir par le haut de la situation. Il se joint à Théa, une bonne amie — sans qu’une relation plus intime soit même suggérée — pour faire partie d’une des équipes concourant lors de cette course maritime autour du globe. Et le reportage qu’il en tirera sera destiné à son journal : Le Globe, justement. Pesant sur ce contexte, le père de Théa (Van Toor) est un homme d’affaires international qui vend du minerai et le fait convoyer en Indonésie. Tous les protagonistes vont converger vers cette zone sensible, indépendante depuis peu, et très convoitée. Un album d’une excellente équipe d’auteurs, à l’action soutenue, et à lire au premier degré.
Lire la suite...Se faire la belle, un jour ?

Quand on apprécie un auteur, il est toujours tentant de découvrir ce qu’il a fait avant qu’on ne le repère. Ainsi Bruno Duhamel avait-il édité « Le Voyage d’Abel », en 2014, en autoédition. Introuvable, bien évidemment. C’est donc avec curiosité qu’on se lance sur cette réédition, d’autant que son vieux paysan rêveur titille la curiosité et que la couverture enneigée est très attractive…
Abel vit seul dans un petit village, Reclesme comme indiqué page 19 (Reclesne existe bel et bien en Saône et Loire, mais est-ce le même, ce que semble suggérer le dossier de presse ?). Abel, donc, seul et isolé. Seul ? Pas tout-à-fait. Il a avec lui un chien fidèle, toujours dans ses basques, bien que rabroué vigoureusement par le vieux paysan, lequel possède aussi deux vaches et quelques brebis. Ca limite les conversations, mais ça crée des liens ! Il est d’ailleurs un peu brutal avec tout ce petit monde. C’est sa façon d’aimer !
Mais, Abel a un jardin secret : les voyages. Pourtant, il n’a jamais quitté sa terre. Un jour, pourtant, c’est sûr, il partira. Enfin, il l’espère. Il commande même des guides touristiques qu’il reçoit par la poste, mais c’est tout. Ah, l’Éthiopie, s’il pouvait, lui qui voulait « être marin, prendre le large » et qui s’est cantonné à labourer sa terre !
Duhamel est comme avec son héroïne de « Jamais » (chroniqué ici-même), tendre avec ce vieil homme bougon, perclus de rhumatismes et de vieilles habitudes. On s’attendrit avec lui pour ce vieux bougre qui écoute son transistor lui dégainer des chansons exaltant les voyages, alors qu’au-dehors la neige plombe les paysages. Ce personnage créé par la scénariste Isabelle Sivan, accumulant les guides sur ses étagères, perdu dans ses rêveries et qui boit pour oublier, a tout simplement « attrapé la vieillesse », comme dit son médecin…
L’empathie qu’on a pour Abel tient aussi à la façon qu’a Duhamel de dessiner ses personnages, de ce trait caricatural qui rend les coléreux presque drôles et les aigris quasi sympathiques. On se rappelle de Madeleine dans « Jamais », la mémorable casse-pied, ou du héros de « Nouveau contact », albums qui soulignent d’ailleurs le goût de l’auteur pour les villages et les voyages. N’oublions pas cet autre voyage, à Lanzarote, dans « Le Retour », consacré à sa façon à l’artiste Manrique…
Que des albums pour méditer sur cette jolie phrase : « La vie est un voyage, pas une destination.»
Didier QUELLA-GUYOT ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
[L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook.
« Le Voyage d’Abel » par Bruno Duhamel et Isabelle Sivan
Éditions Grand Angle (14,90 €) – ISBN : 978-2-8189-7790-3
PS : Pour être complet, le signataire de ces lignes est d’autant plus touché par cet album, qu’il a mis en scène également, dans « L’Ile aux remords » dessiné par Sébastien Morice, un vieux paysan des Cévennes rêvant des îles et collectionnant les histoires insulaires…
Cet auteur enfile les réussites – de même que Bonin : la BD franco-belge n’est pas morte, donc, mais je constate qu’elle ne se trouve plus chez Dupuis-Dargaud-Le Lombard.