Guy Lefranc est de retour, pour une aventure très lointaine, périlleuse et aux enjeux politiques : ce qui n’est pas la première fois. Naturellement, cette régate lui réserve de graves imprévus et, tout aussi certainement, le journaliste déploiera tout son courage et sa compétence pour sortir par le haut de la situation. Il se joint à Théa, une bonne amie — sans qu’une relation plus intime soit même suggérée — pour faire partie d’une des équipes concourant lors de cette course maritime autour du globe. Et le reportage qu’il en tirera sera destiné à son journal : Le Globe, justement. Pesant sur ce contexte, le père de Théa (Van Toor) est un homme d’affaires international qui vend du minerai et le fait convoyer en Indonésie. Tous les protagonistes vont converger vers cette zone sensible, indépendante depuis peu, et très convoitée. Un album d’une excellente équipe d’auteurs, à l’action soutenue, et à lire au premier degré.
Lire la suite...Avec « Raven », Mathieu Lauffray dynamite les poncifs de la piraterie…

Le dessinateur de « Long John Silver » replonge avec délectation dans la grande aventure des boucaniers des Caraïbes : une imagerie spectaculaire qu’il exploite, cette fois-ci seul maître narratif à bord, en multipliant les abordages dantesques, les tempêtes dévastatrices, les coups de canon tonitruants et les combats au sabre sans pitié… peuplés de personnages hauts en couleur : que ce soit le chevaleresque feu-follet qu’est Raven, la cupide et redoutable Lady Darksee ou la naïve et jolie aristocrate Anne de Montignac, laquelle se retrouve, sans le vouloir, au milieu de leur ravageuse dualité…
En ce milieu du XVIIe siècle, la Jamaïque et l’île de la Tortue regorgent de gouverneurs sans foi ni loi, de forbans en tout genre, de jeunes femmes téméraires et de trésors enfouis. L’impétueux Raven, ancien mousse dans la Royale qui fut enlevé par des pirates (et qui en est devenu un), convoite celui de la cité maya Chichén Itzá qui a été perdu depuis des lustres par les soldats de Cortés : il serait enterré, selon la légende, au Morne-du-Diable, une île infestée de cannibales. L’ennui, c’est que la bravache Lady Darksee, aussi jolie que son cœur est noir et blessé, a également des vues sur ce fameux trésor.
Mathieu Lauffray s’en donne à cœur joie avec la mythologie de la flibuste, la furie des éléments, et les protagonistes au propre arbitrage qui ont dû créer des sociétés alternatives. Grâce à une mise en pages dynamique et une narration sans faille, ces pages explosent littéralement sur le plan graphique ! Certaines scènes sont même complètement picaresques, la précision du trait côtoyant des personnalités aux trognes caricaturales, voire humoristiques…
Celui qui travailla, jusque-là, sur des univers et des supports bien différents, allant des jeux vidéo au cinéma (« Nemo » et « Le Pacte des loups » avec Christophe Ganz) ou de l’historique à la science-fiction, s’amuse ici avec les genres et les techniques : il propose des kaléidoscopes de situations et de personnages que l’on aurait pu retrouver dans des mangas, des comics ou des séries télé.
Signalons, toutefois, que pour l’intrigue de « Raven », Mathieu Lauffray s’est très librement inspiré de « Vulméa, le pirate noir » : une longue nouvelle écrite par le créateur de « Conan the Barbarian » : Robert E. Howard.
De toute façon, pour notre dessinateur, le récit de piraterie est juste un outil dramaturgique qui lui permet de mettre en place un environnement pictural magnifié…
Mais aussi de mettre en scène toutes ces pulsions humaines qui produisent des énergies non maîtrisables, mues par des principes de liberté et d’accomplissement personnel.
Gilles RATIER
« Raven T1 : Némésis » par Mathieu Lauffray