Guy Lefranc est de retour, pour une aventure très lointaine, périlleuse et aux enjeux politiques : ce qui n’est pas la première fois. Naturellement, cette régate lui réserve de graves imprévus et, tout aussi certainement, le journaliste déploiera tout son courage et sa compétence pour sortir par le haut de la situation. Il se joint à Théa, une bonne amie — sans qu’une relation plus intime soit même suggérée — pour faire partie d’une des équipes concourant lors de cette course maritime autour du globe. Et le reportage qu’il en tirera sera destiné à son journal : Le Globe, justement. Pesant sur ce contexte, le père de Théa (Van Toor) est un homme d’affaires international qui vend du minerai et le fait convoyer en Indonésie. Tous les protagonistes vont converger vers cette zone sensible, indépendante depuis peu, et très convoitée. Un album d’une excellente équipe d’auteurs, à l’action soutenue, et à lire au premier degré.
Lire la suite...« Le Jardin, Paris » : tolérance de la différence et révélation d’une talentueuse jeune autrice…

Après un premier album jeunesse qui parlait déjà du thème de la différence de façon très originale (« Les Fleurs de grand frère » publié également chez Delcourt, en 2019), le grand public va pouvoir découvrir, avec « Le Jardin, Paris » proposé dans la belle collection Mirages, toute la sensibilité de Gaëlle Geniller : une créatrice aux propos justes sur l’ambiguïté sexuelle, maîtrisant narration et graphisme, et imposant ses propres tons et atmosphères.
Elle y évoque, dans une ambiance florale (toutes les danseuses protagonistes de cet émouvant récit ont des noms de fleurs) et un peu idéalisée, une tranche de vie particulière dans un cabaret parisien — appelé Le Jardin —, pendant la période de l’entre-deux-guerres. L’une de ses principales attractions consiste en l’effeuillage burlesque de Rose : jeune homme androgyne en quête de son identité sexuelle, lequel a été élevé, depuis sa naissance, dans ce lieu de spectacle nocturne dirigé par sa mère.
Sa réussite chorégraphique va d’ailleurs bouleverser l’équilibre de cette bienveillante communauté quasi familiale, car elle suscite déjà l’intérêt du Tout-Paris et, notamment, celui d’Aimé : le riche héritier d’une maison d’édition qui a, semble-t-il, jeté son dévolu sur le non-binaire Rose, puisqu’il ne rate aucune de ses représentations.
Un dessin épuré, entre franco-belge et manga, de jolies couleurs et des décors fort bien reconstitués (comme le prouvent une partie de ses recherches compilées dans un agréable cahier graphique en fin d’ouvrage) font de ce charmant récit une ode à la tolérance qui diffuse un message universel, en encourageant les jeunes à vivre leur vie comme ils l’entendent : qu’ils soient homme, femme, les eux ou aucun des deux.
Le scénario, sublimé par la légèreté et la grâce du trait, surprendra, page après page, le lecteur par sa fraîcheur et son altruisme, même si l’on ne pourra pas s’empêcher, évidemment, de penser au formidable « Peau d’homme » d’Hubert et Zanzim (1) qui fait également la part belle à l’ambiguïté sexuelle. L’autrice reconnaît d’ailleurs l’influence de son scénariste, décédé tragiquement au début de 2020, sur la création de cet intelligent roman graphique inaugurant, de fort jolie façon, une année de publications que l’on espère aussi réussies.
(1) Voir La quête folle et ardente de l’amour, sans contrefaçon, dans l’ultime scénario d’Hubert… et « Peau d’homme » par Zanzim et Hubert, Grand Prix de la Critique ACBD 2021.
« Le Jardin, Paris » par Gaëlle Geniller
Éditions Delcourt (25,50 €) — EAN : 979-2-4130-2253-4