« Champignac » met à l’honneur l’un des personnages les plus généreux et des plus attachants de la galaxie « Spirou », en dévoilant son passé dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, avant qu’il rencontre le héros donnant son titre au journal des éditions Dupuis. Outre le fait de divertir efficacement, le but de cette série dérivée est de vulgariser des sujets scientifiques et sociologiques pour toucher les jeunes lecteurs. Dans cet encore très réussi tome 4, où un Pacôme irritable et dépressif croise d’éminents confrères de l’époque (Einstein, Feynman ou Oppenheimer, récemment mis en lumière avec le film de Christopher Nolan), les Béka et David Etien abordent, avec authenticité et psychologie, le problème de la fabrication de la bombe atomique, à laquelle notre original mycologue va inconsciemment contribuer…
Lire la suite...« La Tresse » : trois femmes de mèches…

Paru en 2017 chez Grasset, « La Tresse », titre du premier roman de Laetitia Colombani, remportait en quelques mois un très vif succès : un million d’exemplaires vendus, des traductions en 36 langues et 20 prix littéraires ! Racontant le destin croisé de trois femmes sur trois continents, ce conte moderne et humaniste est adapté chez Soleil de belle manière par Lylian et Algésiras. Les lecteurs y retrouveront avec plaisir Smita, Giulia et Sarah, toutes liées par la même volonté de s’affranchir des carcans. Trois héroïnes du quotidien, qui tissent d’émouvantes histoires synonymes d’espoir et de solidarité…
En couverture, trois jeunes femmes, visiblement de trois nationalités différentes (canadienne, indienne et sicilienne) contemplent leurs visages réunis, reflétés par une flaque d’eau. En position accroupie ou agenouillée, ses femmes semblent tisser, entrelacer leurs destins en commun… par le biais de leurs cheveux. De fait, des tréfonds miséreux de l’Inde aux immenses buildings canadiens, en passant par la flamboyante Sicile, Smita, Sarah et Giuila sont liées sans le savoir : leurs existences conjuguées construisant – sur un mode semi-mystique, selon le visuel de couverture nimbé d’une lumineuse couleur or – comme une tresse d’espoir et de solidarité. L’ouvrage de Laetitia Colombani, nous l’avons dit, est un voyage au cœur de la condition des femmes du monde moderne ; un hommage à toutes celles qui se battent pour leur liberté.
Les combats de ces trois femmes sont des quêtes jusqu’au bout d’elles-mêmes : en Inde, Smita, qui appartient à la caste des intouchables et vide les excréments des latrines sèches, rêve de voir sa fille apprendre à lire pour échapper à son sort. En Sicile, Giulia, qui est ouvrière dans une fabrique de perruques à Palerme, découvre – après l’accident dont est victime son père – que l’atelier familial est ruiné. Kamal, un Indien sikh, pourra-t-il apporter la solution à se problèmes ? Sarah, avocate canadienne, apprend pour sa part qu’elle est atteinte d’un cancer du sein relativement avancé. Elle va dès lors regarder sa vie d’une autre façon.
Salué par le Prix Relay des voyageurs lecteurs en 2017 et par le Globe de cristal du meilleur roman en 2018, « La Tresse » fait partie de ces romans destinés à être lu par tous les publics, se jouant des stéréotypes, rebondissements et situations attendues. La version dessinée est du même registre : structurée en chapitres et selon un suspense plus ou moins convenu. Au-delà de l’adaptation effectuée par Lylian (auteur de l’adaptation des « Mondes d’Ewilan » de Pierre Bottero et scénariste des « Géants » chez Glénat) et du trait clair d’Algésiras (également scénariste, l’autrice a adapté en 2005-2006 les « Guerriers du silence » de Pierre Bordage ; dessin de Philippe Ogaki), l’essentiel demeure néanmoins : un message initial n’ayant nul besoin d’odyssée échevelée ou de vie aventureuse ne tenant qu’à un fil, pourvu que l’on puisse tresser des lauriers aux protagonistes ! Et de dénoncer, au passage, un commerce mondialisé des cheveux qui rappellera des extraits notables des « Misérables » (Victor Hugo, 1862), roman où Fantine vend ses cheveux, puis ses dents, avant de se prostituer. Au début du XIXe siècle, environ 15 000 immigrants vendaient leurs cheveux chaque année à leur arrivée à New York. Aujourd’hui encore, une véritable mafia règne sur ce commerce où, du Venezuela à l’Inde en passant par l’Espagne ou l’Afrique du Sud, une couette de cheveux peut valoir jusqu’à 200 euros sur le marché noir, en fonction de son état et de sa longueur. Le sujet ressurgira en novembre 2023, date fixée sur les écrans pour l’adaptation cinématographique de « La Tresse », réalisée par Laetitia Colombani.
Philippe TOMBLAINE
« La Tresse » par Algésiras et Lylian, d’après Laetitia Colombani
Éditions Soleil (17,95 €) – EAN : 978-2302089600
Parution 7 décembre 2022