« Pompéi », quand la fiction dépasse la réalité…

Pompéi : un nom mythique, celui de la petite ville romaine toujours partiellement ensevelie sous les cendres de l’éruption du volcan voisin, le Vésuve, en l’an 79 de notre ère. Si cette cité antique marque la mémoire collective, aucune bande dessinée ambitieuse ne lui avait encore été consacrée. C’est dorénavant chose faite avec « Assa » : une amorce de courte série.

Tout commence en 2023 lors d’un déjeuner entre l’éditeur, Nicolas Anspach, et le scénariste de ce premier tome, Rudi Miel, qui travaillent alors sur « Godefroy » (avec le dessinateur Théo Dubois d’Enghien). Fort du constat de cette absence de BD sur Pompéi, le duo décide aussitôt la réalisation d’une série. Rapidement, un trio d’auteurs se reforme : le scénariste ; une coscénariste, Fabienne Pigière ; un dessinateur, Paolo Grella. Italien, il va sans dire. Tous trois ont déjà œuvré ensemble de 2017 à 2019 sur une trilogie parue aux éditions Casterman : « Libertalia ». Miel et Pigière ont également co-écrit la mini-série « Buonaparte » chez Delcourt, avec Iván Gil au dessin.

Aujourd’hui, paraît donc le one-shot « Assa », titre du premier album de la série « Pompéi », une œuvre de fiction ancrée dans la ville éponyme et se déroulant juste avant l’éruption du Vésuve. Ce tome, riche de 46 planches complétées d’un dossier graphique,évoque le fameux lupanar de Pompéi, un édifice toujours debout, l’un des lieux les plus emblématiques de la cité. Experte en archéozoologie, docteure en histoire, art et archéologie (dont certaines recherches ont été publiées dans National Geographic), Fabienne Pigière est la partenaire idéale sur cette série dont la narration sourcée s’inscrit dans la plus fiable retranscription historique, de décors, de la vie quotidienne et des mœurs des protagonistes.

D’emblée, le style du quadragénaire Paolo Grella est frappant. Son trait réaliste, habillé de couleurs directes exécutées à l’aquarelle, apparaît remarquable. Si son style académique est abouti, tant du point de vue perspectif qu’anatomique, il n’en reste pas moins vivant : une vraie cerise sur le gâteau. Dans le passé, il a séduit les scénaristes Roberto Dal Prà et Frank Giroud. À45 ans, le maestro de Fabriano nous réserve sans doute d’autres bijoux graphiques.

Captivant, le scénario de cette fiction historique — ni documentaire ni BD historique donc — use d’un ressort classique, la vengeance, dont la forte tension dramatique est exacerbée par l’imminence de l’éruption volcanique d’octobre 79. Ce premier tome se concentre sur Assa : une femme arrachée à son village par la soldatesque romaine et muée en esclave au service du notable Probus. En entretenant une liaison amoureuse avec le fils de l’éminent Probus, l’artiste Aurélius, elle s’attire les foudres du père, lequel entend marier son rejeton à la fille de l’homme dominant la cité. Dès lors, Probus vend son esclave au lupanar, synonyme de descente aux enfers. Pour autant, la belle Assa au destin brisé ne renonce nullement à sa passion, quitte à affronter Probus… Son destin se noue ainsi un cauchemardesque 24 octobre 79, au paroxysme du danger…

Comme ce poignant « Assa », chacun des albums de cette série se focalisera sur un protagoniste particulier, aux prémices de cette même tragédie antique. Pour l’heure, chacun d’eux est un personnage secondaire de ce premier album, qui est synonyme de plaisir de lecture.

Jean-François MINIAC 

 « Pompéi » par Paolo Grella, Rudi Miel et Fabienne Pigière  

Éditions Anspach (16 €) — EAN : 9782931105412

Parution 16 mai 2024

Galerie

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>