« Les Damnés de l’or brun » : une saga prometteuse au goût d’inachevé…

Lancé avec la promesse de proposer aux lecteurs amateurs du genre une longue saga familiale, « Les Damnés de l’or brun » ambitionne d’évoquer l’histoire de l’industrie du chocolat de ses origines à nos jours. Ce troisième ouvrage, consacré à l’année 1878, est, hélas !, le dernier. Pour les amateurs de cette série classique, voilà une conclusion un peu décevante, au goût aussi amer que celui du chocolat. Adieu Rosa Dumont, Marc Loiseau, Alain Swijsen, Christian Dallier, Stephen Wayne et bien d’autres descendants de Maria Da Silva et de Tiago Da Costa Socrates présentés dès le premier album dans l’imposant arbre généalogique publié en guise de pages de garde…

En 1832, au Brésil, les combats pour l’indépendance du pays font rage. Tout oppose les frères Louis et Tiago Da Costa. Tiago abandonne l’exploitation familiale de Cacao en flammes, pour s’exiler sur l’île de Sao Toumé, au large de l’Afrique. Il est accompagné par Maria, la belle et farouche esclave dont son frère abusait. Avec son aide, Tiago crée la première exploitation cacaoyère d’Afrique. Devenu marchand d’esclaves 20 ans plus tard, Louis, accompagné par son fils Philippe, gagne Sao Toumé dans le but de se venger de son frère. Philippe tombe amoureux de Sofia, la fille de Tiago et Maria, qui apprend qu’en réalité Louis est son véritable géniteur. Face à cet amour impossible, Sofia se jette du haut d’une cascade sous les yeux des deux frères. Mourante, elle demande à Philippe de créer la première exploitation de cacao sans esclaves.

Le présent album débute en 1878 alors que Philippe Da Costa se rend à Paris après avoir découvert une nouvelle fève de cacao au Sri Lanka. Il compte sur l’exposition universelle pour prospecter de nouveaux marchés pour le compte de la célèbre entreprise chocolatière Menier. À deux reprises, il croise la route d’une jeune femme ressemblant trait pour trait à Sofia. L’esclavage est interdit dans les colonies de l’Empire britannique, alors que les autres producteurs continuent leur exploitation. Rongé par la culpabilité, Philippe recherche cette mystérieuse femme qui est le sosie de Sofia. Fille de Maria et Tiago, sœur de la défunte Sofia, Indalina aide le jeune pâtissier français Nicolas Loiseau à mettre au point un gâteau au chocolat susceptible de remporter le prix de l’Exposition universelle que convoite aussi Philippe…

À l’issue de ces retrouvailles, deux pages situées à notre époque concluent brutalement cette passionnante saga. Maigre consolation, un dossier de huit pages évoque brièvement le destin des descendants de Tiago et Maria, laissant le lecteur sur sa faim. Décision de l’éditeur considérant les ventes insuffisantes ? Souhait du dessinateur d’abandonner ses personnages ? Ou bien un peu des deux ? Une chose est certaine, le dossier final ne peut faire que regretter l’ambitieux et séduisant projet initial déjà imaginé par le scénariste.

Francis Vallès.

Restent trois albums dont la lecture comblera ceux qui ont apprécié « Les Maîtres de l’orge » (même éditeur et même dessinateur) qui, à l’époque, avaient eu l’audace de mener la série à sa conclusion.

Excellent dessinateur réaliste classique, Francis Vallès n’a pas perdu la main, illustrant avec précision la France de la fin du XIXe siècle de son trait souple et précis. La série « Les Damnés de l’or brun » possède tous les atouts des feuilletons qui ont fait le bonheur des lecteurs du siècle précédent. Aujourd’hui, la société a évolué : Netflix et consorts ont remplacé le papier imprimé dont se régalaient nos parents et grands-parents.

Né le 11 décembre 1959 à Saint-Chély d’Apcher, Francis Vallès étudie à l’École supérieure d’art et de design de Saint-Étienne. Après avoir publié quelques histoires courtes pour les magazines Fleurus et Bayard, il signe en 1983 « Simon Francoeur » aux éditions Magic-Srip. Une longue collaboration débute ensuite avec les éditions Glénat : « Dorian Dombre », « Les Maîtres de l’orge », « Tosca »… Pour les éditions du Lombard, il dessine « Rafale », puis à partir de 2009 les sept volumes de « Rani » écrits par Alcante, d’après le feuilleton TV scénarisé par Jean Van Hamme.

Didier Swysen, dit Didier Alcante.

Didier Swysen, né le 21 novembre 1970 à Uccle en Belgique, effectue des études de sciences économiques. Chercheur à l’Université d’Anvers, puis conseiller en entreprise, enfin dans un cabinet ministériel, il propose un premier scénario en 1995 à l’occasion d’un concours organisé par Spirou. Sous le pseudonyme Alcante, il scénarise plusieurs séries (« Pandora Box », « Jason Brice » ou « Interpol » chez Dupuis), puis pour Glénat co-écrit « Ars Magna » et « Lao Wai » avec Louis-Frédéric Bollée, avant de publier le best-seller « la Bombe ». Pour le même éditeur, il démarre en 2023 l’adaptation des « Piliers de la terre » (d’après Ken Follett) pour Steven Duprè.

Fabien Rodhain.

Enfin, il propose « Whisky San » chez Grand Angle en 2024, avec Fabien Rodhain. Didier Alcante, qui devient scénariste à part entière à partir de 2008, est l’auteur en 2011 de « Colonel Amos » pour la série « XIII Mystery ».

Né le 22 juin 1966 à Metz, Fabien Rodhain s’engage, dès son plus jeune âge, pour la transition écologique et humaine. Auteur de romans et de pièce de théâtre, il aborde la bande dessinée avec la publication des « Seigneurs de la terre » aux éditions Glénat, en 2016. Co-scénariste avec Éric Corbeyran de deux titres de la série « Venifera », il signe « Whisky San » pour Grand Angle en 2024. Pour le même label, il écrit en 2025 le roman graphique « La Vallée du vivant » dessiné par Alicia Grande.

Henri FILIPPINI

« Les Damnés de l’or brun T3 : Paris 1878 » par Francis Vallès, Didier Alcante et Fabien Rodhain

Éditions Glénat (14,95 €) — EAN : 9782344056134

Parution 28 mai 2025        

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