Un troisième volume du « Paris des merveilles » : véritable hommage à Étienne Willem, un an après sa disparition…

Étienne Willem nous a quitté le 16 juin 2024. Auteur talentueux, il était en train d’illustrer le troisième volume d’une remarquable série : « Le Paris des merveilles ». Il avait déjà réalisé une quinzaine de planches. La jeune autrice Capia a relevé avec talent le défi de poursuivre son travail, à partir du storyboard déjà dessiné. Le résultat est enthousiasmant jusqu’au cahier graphique en fin d’ouvrage qui rassemble une série de dessins d’Étienne Willem réalisés pour un grand projet qu’il menait en parallèle : « Clans of London ».

Pierre Revel est l’un des grands écrivains français de fantasy. Après avoir reçu de multiples récompenses comme le Grand Prix de l’imaginaire en 2002 ou le prix Imaginale en 2005, il se tourne résolument vers la transmédialité en adaptant notamment ses romans pour la bande dessinée. Ainsi la trilogie « Le Paris des merveilles » est en cours de publication en six volumes : deux par roman. C’est Étienne Willem qui s’est chargé de cette adaptation après avoir brillamment collaboré avec le romancier sur la série « Les Artilleuses ». Ce troisième volume, si particulier, est donc la première partie de l’adaptation du second roman.

Dans cet article, nous contextualisions le début du récit ainsi : « Nous sommes en 1909 dans la ville lumière. Mais ce Paris de la Belle Époque vous étonnera, car le cours de l’histoire a été modifié un siècle auparavant par la découverte de l’OutreMonde : un monde magique et féérique dirigé par une reine fée depuis sa capitale d’Ambremer.

Sa gouvernance n’est pas facile. Il faut assurer un équilibre politique entre dragons, orcs, différents peuples fantastiques et même chats ailés philosophes. Ces êtres merveilleux déambulent librement dans Paris, car la capitale française est relié à Ambremer par le métro. La magie interfère avec le quotidien des Parisiens.

En sus des êtres féériques, des objets et des pratiques enchantés se sont répandus depuis la connexion des deux mondes. Ainsi, des cercles de mages ont pignon sur rue. On peut les consulter avec bénéfice. Le cabinet de Louis Denizart Hippolyte Griffont, mage du cercle de Cyan, est ainsi très couru. »

Griffont est le héros de la série : un dandy, véritable mage gentleman qui exerce son art avec élégance et un certain détachement. Il a dénoué assez facilement les fils d’une première enquête sur un vulgaire tricheur, mais, cette fois, l’affaire est plus complexe et dangereuse. Elle le mène sur les traces d’un redoutable sorcier maléfique : Giacomo Nero.

Une histoire qui a commencé par des meurtres dans le Paris de la Régence, au début du XVIIIe siècle, à une époque où l’OutreMonde n’était pas connu, alors que notre dandy perspicace n’était qu’un fringant capitaine de cavalerie. C’est en 1720 qu’il rencontre la mystérieuse et voluptueuse Baronne de Saint-Gil, avec qui il commence une longue relation d’amitié amoureuse.

C’est un grand plaisir de retrouver le petit monde original du « Paris des merveilles » : mélange de fantasy et de steampunk, mais aussi d’enquête policière et de magie dans le Paris de la Belle Époque. Le lecteur est pris par ce récit intrigant, aux rebondissements feuilletonnesques, dont on ne lâche la lecture qu’à la dernière page, à regret. L’entente du romancier avec Étienne Willem a été un facteur déterminant de cette réussite éditoriale.

À l’origine, il y a les romans de Pierre Pevel, un auteur à succès de la fantasy francophone. Étienne Willem a scénarisé lui-même l’ouvrage que le romancier a dialogué avec sa verve habituelle. Le dessin vif et inventif du dessinateur belge a été repris en cours de réalisation par Capia, car son style se rapprochait de celui d’Étienne. Le résultat est bluffant : on ne discerne pas le changement de dessinateur autour de la 16e planche. Les décors et les expressions corporelles et faciales sont toujours aussi précis et un humour référencé inonde toujours les cases de l’album. Excellent travail aussi de la coloriste Tanja Wenisch dans des planches contrastées aux couleurs froides ou chaudes, ainsi que pour les séquences nocturnes aux bleutés poétiques.

Saluons encore une fois la mémoire d’ Étienne Willem parti il y a un an déjà avant de fêter ses 52 ans : voir Décès d’Étienne Willem : le monde de la bande dessinée bouleversé !. Il a su créer un univers foisonnant et jubilatoire qui lui survit à partir de cet album. La série se poursuivra donc, notamment avec la suite et la fin de ce diptyque : « L’Élixir d’oubli ». L’occasion pour le lecteur attentif de s’attarder au hasard des cases sur un gnome habillé à la gavroche au zinc d’un bistrot, sur un allumeur de réverbères qui s’aide d’un petit dragon pour souffler sur les becs de gaz ou sur un caméo hommage à Étienne Willem dans la première case de la page 51.

Laurent LESSOUS (l@bd)

« Le Paris des merveilles T3 : L’Elixir d’oubli T1 » par Étienne Willem, Capia et Pierre Pevel, d’après Pierre Pevel

Éditions Drakoo (15,90 €) – EAN :  9782382332245

Parution 29 octobre 2025

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