« Champignac » met à l’honneur l’un des personnages les plus généreux et des plus attachants de la galaxie « Spirou », en dévoilant son passé dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, avant qu’il rencontre le héros donnant son titre au journal des éditions Dupuis. Outre le fait de divertir efficacement, le but de cette série dérivée est de vulgariser des sujets scientifiques et sociologiques pour toucher les jeunes lecteurs. Dans cet encore très réussi tome 4, où un Pacôme irritable et dépressif croise d’éminents confrères de l’époque (Einstein, Feynman ou Oppenheimer, récemment mis en lumière avec le film de Christopher Nolan), les Béka et David Etien abordent, avec authenticité et psychologie, le problème de la fabrication de la bombe atomique, à laquelle notre original mycologue va inconsciemment contribuer…
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Ça y est, Manu Larcenet a mis le mot fin à son faux polar aussi sombre que dérangeant : un long thriller bien noir en bande dessinée, dont certaines interrogations trouvent enfin leurs réponses avec ce quatrième tome ; comme la présence de mystérieuses statues de l’Île de Pâques dans ces sortes d’orgasmes éthyliques que le « héros » appelle le « blast ». Depuis 2009, on suit donc l’errance de Polza Mancini, obèse auteur d’ouvrages gastronomiques d’à peine quarante ans qui, lorsqu’il a appris le décès de son père, a sombré dans la dépression et a décidé de tout laisser tomber pour devenir quasi clochard. Ou, du moins, ce qu’il veut bien raconter, pendant sa garde à vue, à deux policiers qui l’interrogent sur ce qu’il a pu faire à Carole Oudinot, jeune fille qu’il est soupçonné d’avoir assassiné, après son séjour en hôpital psychiatrique. Et nous, lecteurs, nous n’avons plus aucun doute : cette descente aux enfers est un véritable chef-d’œuvre du 9e art.
En effet, il s’agit d’un roman graphique psychanalytique exigeant, où chaque bribe de l’histoire se répond parfaitement. Cela a dû, d’ailleurs, nécessiter une rigueur incroyable pour que le fil du récit ne nous échappe jamais.
On pourrait même commencer avec ce dernier acte, sans avoir lu les précédents, et se faire embarquer de la même façon par ce témoignage halluciné d’un cas psychiatrique hors du commun : sur le plan narratif, cet ultime volume, dense et concentré, est mené d’une façon magistrale, n’offrant comme seuls répits que quelques expérimentations graphiques où Larcenet alterne compositions naturalistes colorées, joyeux dessins d’enfants et strips comiques signés par son complice et ami Jean-Yves Ferri (avec qui il réalise l’amusante série « Le Retour à la terre »).
Son propre graphisme, quant à lui, reste noir de chez noir (comme son propos), avec quand même un peu de gris par-ci par-là, mais il semble surtout plus élégant et plus fluide. Il est même peut-être encore plus abouti que sur les tomes précédents, notamment au niveau des expressions des différents protagonistes qui, elles, paraissent plus subtiles au milieu de cette atmosphère poisseuse si bien retranscrite, où l’équilibre entre fantasmes et réalité se dégrade au fur et à mesure que l’on avance vers la vérité… Et, évidemment, cela ne peut pas se finir bien…
Gilles RATIER
« Blast T4 : Pourvu que les bouddhistes se trompent » par Manu Larcenet
Éditions Dargaud (22,90 €) – ISBN : 978-2205 — 07273-0