Guy Lefranc est de retour, pour une aventure très lointaine, périlleuse et aux enjeux politiques : ce qui n’est pas la première fois. Naturellement, cette régate lui réserve de graves imprévus et, tout aussi certainement, le journaliste déploiera tout son courage et sa compétence pour sortir par le haut de la situation. Il se joint à Théa, une bonne amie — sans qu’une relation plus intime soit même suggérée — pour faire partie d’une des équipes concourant lors de cette course maritime autour du globe. Et le reportage qu’il en tirera sera destiné à son journal : Le Globe, justement. Pesant sur ce contexte, le père de Théa (Van Toor) est un homme d’affaires international qui vend du minerai et le fait convoyer en Indonésie. Tous les protagonistes vont converger vers cette zone sensible, indépendante depuis peu, et très convoitée. Un album d’une excellente équipe d’auteurs, à l’action soutenue, et à lire au premier degré.
Lire la suite...Une intégrale « Messara », et c’est l’Atlandide qui refait surface…

Réédition bienvenue d’un triptyque antique de qualité, créé au début des années quatre-vingt-dix, « Messara » met particulièrement le dessin de Jacques Terpant en lumière. Cette série révèle clairement un début de deuxième période dans sa carrière, devenue prolifique, mais surtout reconnue et récompensée, depuis.
En 1994, Jacques Terpant, déjà connu des lecteurs de la revue Métal hurlant et ayant à son actif quelques albums stylés de guerre ou de science-fiction aux Humanoïdes associés, ainsi que d’autres plus réalistes chez Zenda, se projette dans la Grèce du minoen moyen (- 2000 à – 1550), avec le scénariste Philippe Bonifay : « Les Chariots de Thespis » et « Zoo », entre autres. Ils ont déjà travaillé ensemble sur « Le Passage de la saison morte » (Glénat, 1989), mais se retrouvent ici pour un péplum et une idée très originale : raconter la fin (supposée) de la civilisation minoenne, basée en Crète et sur l’île de Santorin, détruite en partie en 1600 avant Jésus Christ par l’éruption de la caldera soutenant l’île. Une gageure historique, menée de main de maître par les deux artistes.
Kantana est une jeune et belle esclave égyptienne qui vient d’être achetée par son maître, un propriétaire minoen vivant sur l’île du Santorin (ici appelée Stronggylé). Son fils Hermian est amoureux d’elle et une relation d’un soir va donner naissance à celle qui va devenir Messara. C’est un flash-back qui nous dévoile cette origine, Hermian sombrant ensuite dans la folie, en voyant son père récolter le fruit de ses amours. Le contexte est alors tendu, car une invasion des Achéens, menés par le roi tyrannique Minos, est en cours. Harralambos, prince frictionnel de Strongyllé, a néanmoins détaché une armée de mercenaires afin de faire face. Tous sont très courageux, et malgré une éruption du Santorin qui détruit une grande partie de leurs fortifications, ils réussissent à repousser l’attaque.
Le présent nous ramène sur les côtes de Strongyllé, où Messara, ayant fui, et devenue adulte, vogue vers son passé pour déjouer une bonne fois pour toutes les plans du roi Minos. Elle a été formée militairement par le Celte Adulas, lequel a mené la première guerre contre le roi, quelques années auparavant, avec ses mercenaires celtes, hati et nubiens. Cela va être l’occasion, pour elle, de découvrir son père et de mettre en pratique sa formation, en utilisant son nouveau statut de prêtresse, puisqu’elle s’est fait accepter dans le temple pour cette fonction sacrée.
Puisant dans des références historiques très anciennes et spécialisées ou s’aidant au passage d’autres, mythologiques, plus connues, Philippe Bonifay construit un scénario riche et passionnant. Certes, ce dernier est rendu un peu compliqué par le système du flash-back, mais cela renforce l’impression de récit raconté (chanté), comme savaient si bien le faire les civilisations méditerranéennes d’alors. Le dessin de Jacques Terpant, à la fois réaliste, souple et à l’encrage clair et dynamique, sert à merveille l’histoire, dans une mise en page aérée très lisible. Les couleurs directes apportant une touche classique non dénuée d’intérêt.
Pouvoir se plonger dans cette époque sur laquelle nous avons peu de documents, côtoyer par le biais d’un récit mi-fictionnel mi-historique, et mythologique, des personnages tels Minos, le Minotaure, Dédale ou Icare et les suivre dans des lieux qui ont existé ou existent encore, procure un plaisir immense. D’autres récits ont tenté avec plus ou moins de succès l’approche de ces époques antiques, mais une chose est sûre : « Messara » trouve définitivement une place de choix, avec cette belle édition augmentée (1), auprès de vos meilleurs albums d’« Alix », « Jugurtha », « Le Triérarque », « Tirésias », « L’Âge de bronze », « Médée » ou « le Cœur des Amazones ».
Franck GUIGUE
(1) L’album se conclut par un épilogue historique de Jacques Terpant et de nombreux dessins en couleurs et en noir et banc.
« Messara : intégrale » par Philippe Bonifay et Jacques Terpant
Éditions du Long Bec (26,50 €) – ISBN : 979-1092499728