« Le Dernier des géants » : un premier roman graphique prometteur sur le dépassement de soi et la résilience, chez Helvetïq !

Basé sur une expérience de trail (course à pied, sur longue distance, en milieu naturel) vécue par l’auteur et journaliste passionné par les sports de montagne qu’est le Chamoniard Doug Mayer, « Le Dernier des géants » nous interroge sur le besoin de quête spirituelle et de dépassement de l’humain. Il est mis en forme par l’illustrateur et cinéaste limougeaud (de culture manouche) qu’est William Windrestin : l’un des membres fondateurs du mouvement de peinture H.N.S. — Hyper naïf symbolique —, dont c’est, tout comme l’écrivain sportif à l’origine de cette histoire, la première bande dessinée.

Sam Hill, le héros de cet original livre au format à l’italienne de plus de 200 pages, s’apprête, comme plus de 1 000 autres inscrits — de tous sexes et âges, retenus après un tirage au sort — à participer au départ du Tor des Géants (Tour des Géants, en patois valdôtain) : une compétition d’ultra-trail créée en 2010, se déroulant tous les ans dans 34 communes de la Vallée d’Aoste au mois de septembre. Il s’agit de courir 330 km en montagne, en seulement cinq jours, sans dormir ou presque… 

C’est la troisième fois qu’il s’inflige cette épuisante course, réputée comme l’une des plus dure au monde, avec ses 25 cols et ses 24 000 mètres de dénivelé positif, où même les meilleurs souffrent et affichent régulièrement un visage marqué par la douleur dans les passages les plus difficiles… Comme le dit lui-même le protagoniste : « C’est comme escalader l’Everest, encore et encore. Une seule règle : terminer en moins de 150 heures… »

Entre réalité et hallucinations, Sam va rencontrer, montagne après montagne, des scientifiques, des médecins, une moine bouddhiste ou des sportifs de l’extrême, lesquels lui expliqueront ce qui se passe dans le corps et le cerveau quand on se soumet à un tel effort… Ou lui suggéreront des conseils pour gérer l’insoutenable fatigue. 

Et puis, il y a aussi cette intrigante traileuse qui lui donnera la force de continuer. Mais, avant tout, il va devoir ravaler son ego — symbolisé ici sous la forme d’un dragon — pour pouvoir courir jusqu’au bout et franchir la ligne d’arrivée… Et redevenir soi-même, mais différent, après cette quête spirituelle et méditative.

« Le Dernier des géants » est une passionnante fiction documentaire qui nous fait, in fine, poser bien des questionnements sur la nécessité de s’infliger tout ça ? Qu’est-ce que cet homme est venu chercher dans ces montagnes ? L’être humain a-t-il vraiment toujours besoin d’aller plus loin, de dépasser ses limites, d’entrer dans des états seconds, de toucher du doigt plus grand que soi… ?

Notons que les dernières pages de cette belle et surprenante bande dessinée font, comme le Sam Hill du livre, un tour sur elles-mêmes, et s’inversent pour une nouvelle pratique de lecture aussi étonnante qu’attrayante. 

Outre l’intérêt du sujet et de la réflexion, « Le Dernier des géants » se révèle être un essai narratif très fluide, où le trait volontairement naïf du dessinateur, que l’on sent hésitant par moments, s’aventure sur des terrains graphiques expérimentaux qui peuvent déconcerter, mais finalement séduisent… : un ouvrage tout à fait dans la lignée de la politique éditoriale de l’exigeante maison Helvetïq de Lausanne (Suisse), spécialisée dans les livres jeunesse, mais qui, depuis 2022, développe un fort intéressant et ludique secteur BD !

Gilles RATIER

« Le Dernier des géants » par William Windrestin et Doug Mayer

Éditions Helvetïq (27 €) — EAN : 9782889770427

Parution 22 mai 2025

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