On le sait, l’Espagnol Josep Homs (1) est un dessinateur aussi original que talentueux : il nous l’a prouvé à maintes reprises, ne serait-ce qu’avec sa série « Shi » écrite par Zidrou, dont il prépare le sixième épisode, toujours chez Dargaud. Par ailleurs, avec cet étonnant et glaçant roman graphique de 100 pages qu’il met lui-même en couleurs (et quelles couleurs !) — où une jeune juive très indépendante peut voir et converser avec une incarnation du diable —, il devient, pour la première fois, son propre scénariste. Tout en ressuscitant le mythe du golem et en reprenant le thème philosophique du bien et du mal, il nous démontre que le manipulateur n’est pas toujours celui qu’on croit !
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Monsieur KOHL,
de Dieter et Moynot (Glénat)
Monsieur Khol est transparent. Pas invisible ! Transparent ! Dans la rue, au bureau, au café, dans sa jeunesse ou au cours de sa vie adulte, personne ne remarque Monsieur Kohl.
Son visage est tellement anodin ou tellement banal, pris dans la masse des autres visages de la grisaille urbaine, qu’il en est inexistant (et graphiquement effacé).
Personne ne s’occupe de Monsieur Kohl ! La situation peut générer quelques avantages. Monsieur Kohl est quelquefois « oublié » : par l’armée, au travail en cas de licenciement, … Mais il en résulte surtout des inconvénients : après 10 ans de carrière, Monsieur Kohl n’au eu aucun avancement et les gens ne l’écoutent jamais. Mais c’est la vie de Monsieur Kohl … sa « non-vie » plutôt !
Puis, un jour, M.Kohl tombe malade. Et plus que sa présence, son absence va être remarquée. Mais il est déjà trop tard pour les autres. M. Kohl, parti se reposer à la campagne, y découvre des joies, des peines, des gens attentionnés. Bref, il se découvre lui-même. Son visage peut enfin apparaître.
Dieter et Moynot, qui ont l’habitude de collaborer ensemble (voir le très noir « Bonne fête maman » chez Casterman ou le grinçant « Vieux fou » chez Delcourt) nous livrent ici une œuvre singulière, qui démontre une nouvelle fois la capacité de renouvellement de ce tandem d’auteurs.
Renouvellement dans le ton d’abord puisque qu’ils nous proposent ici une fable métaphorique avec un « happy end ». Renouvellement dans la technique de narration ensuite, Dieter et Moynot ayant écrit à tour de rôle chacune des scènes de l’album. Renouvellement dans le graphisme enfin, Moynot ayant supprimé les contours noirs qui fixent habituellement les limites des personnages et des décors, pour une mise en couleur directe et lumineuse.
Quant à la mise en page de Moynot, elle intègre parfaitement le format carré de l’album, caractéristique de la collection Carrément BD des éditions Glénat, à laquelle ce « Monsieur Kohl » donne toute sa dimension.