On le sait, l’Espagnol Josep Homs (1) est un dessinateur aussi original que talentueux : il nous l’a prouvé à maintes reprises, ne serait-ce qu’avec sa série « Shi » écrite par Zidrou, dont il prépare le sixième épisode, toujours chez Dargaud. Par ailleurs, avec cet étonnant et glaçant roman graphique de 100 pages qu’il met lui-même en couleurs (et quelles couleurs !) — où une jeune juive très indépendante peut voir et converser avec une incarnation du diable —, il devient, pour la première fois, son propre scénariste. Tout en ressuscitant le mythe du golem et en reprenant le thème philosophique du bien et du mal, il nous démontre que le manipulateur n’est pas toujours celui qu’on croit !
Lire la suite...» Canardo » T.19

Á bdzoom.com, on aime bien la série « Canardo » créée en 1978, dans le mensuel (Á suivre), par Benoît Sokal, lequel est, depuis quelques années maintenant, efficacement secondé pour le graphisme par Pascal Regnauld : en effet, cela fait dix-neuf albums que ce détective privé volatile, alcoolique et dépressif, traîne son flegme, sa fatigue et son vieil imper, dans des enquêtes pour le moins pittoresques, dans une ambiance noire à la limite du glauque, sans jamais nous décevoir.
Et cette fois-ci, ce polar animalier plutôt cynique nous permet de découvrir tous les recoins d’un pays que les auteurs connaissent bien : la Belgique.
Hector Van Bollewinkel, le parrain de la mafia belge qui vit depuis des lustres en Amérique, est rongé par un cancer généralisé. Ayant décidé de se suicider avant d’être transformé en « grabataire larmoyant », il lègue toute sa fortune à ses deux petits-enfants : des jumeaux mal élevés, violents, avides et limite débiles. Mais il y a une condition « sine qua non » : il faut que ces derniers acceptent de répandre ses cendres dans un endroit bien précis de son pays natal. Encadrés par l’inspecteur « Canardo », membre éloigné de la famille, dans le rôle du chauffeur, et par une robuste gouvernante flamande au caractère rigide mais aux mœurs un peu plus laxistes, les deux ados vont donc découvrir tout l’intérêt et l’originalité de ce « Plat pays » triste et désenchanté : une visite guidée qui va devenir un véritable circuit initiatique, loin d’être de tout repos…
Construit comme un « road-movie », puisque l’action change d’endroit chaque jour donnant ainsi un effet de cours poursuite, ce « Voyage des cendres », aux dialogues toujours aussi percutants, se révèle plein de clins d’œil (situés entre amour vache et ironie grinçante) à une certaine « belgitude » assez touchante. … ; et comme la narration est sans faille, sans parler des dessins toujours fort bien exécutés, au final, on obtient un vrai plaisir de lecture !
Gilles RATIER
? Canardo T.19 : Le Voyage des cendres ? par Benoît Sokal
Éditions Casterman (10,40 Euros)