Un premier voyage dans les Terres australes et antarctiques françaises — retranscrit dans le très bel ouvrage « Voyages aux îles de la Désolation » — n’a pas rassasié le dessinateur Emmanuel Lepage (1) : 12 ans après, en 2022, il embarque à nouveau pour les îles Kerguelen. N’ayant pas pu, lors de sa première excursion, vivre au plus près le quotidien de tous ceux qui travaillent sur cet archipel au relief montagneux d’origine volcanique, situé au sud de l’océan Indien, il y reste cette fois-ci deux mois et demi : s’attachant donc plus aux personnes qui partent avec lui, tout en montrant les changements déjà à l’œuvre sur la nature, en raison du réchauffement climatique. Du beau, écologique et humaniste, voire quasiment poétique, récit de voyage en BD !
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« Moi, assassin » par Keko et Antonio Altarriba
Étonnant et sarcastique polar psychologique, ce remarquable scénario, bien pervers, est dû au romancier espagnol Antonio Altarriba, déjà remarqué lors de la traduction en français de son « Art de voler » dessiné par Kim, chez le même éditeur, en 2011. Grâce à sa qualité d’écriture et à l’exposition sans détour de ses craintes et de ses interrogations, mais aussi grâce au sobre, mais puissant, trait aux noirs et blancs tachetés de rouge de son compatriote Keko (qui fait beaucoup penser à celui de l’Italien Magnus), il renouvelle avec maestria le thème du serial-killer.
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« La Guerre des Sambre : Maxime & Constance T1 : Automne 1775 » par Marc-Antoine Boidin et Yslaire
Yslaire serait-il le digne successeur de Stendhal ou de Chateaubriand ? C’est ce que l’on pourrait croire à la lecture du premier volet de sa troisième (et ultime ?) déclinaison de la tragique saga transgénérationnelle des Sambre, à la dimension toujours très, si ce n’est même encore plus, littéraire. Pour mettre en images le destin du jeune et sulfureux Maxime, adopté par Charlotte pour mettre fin à la malédiction qui colle à la peau de la famille des Sambre depuis plusieurs générations, le génial dessinateur belge, qui se fit connaître avec l’innovante série jeunesse « Bidouille et Violette » dans Spirou, a renouvelé sa confiance à Marc-Antoine Boidin : illustrateur du précédent cycle qui se révèle, ici, être en totale adéquation avec le récit.
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« Bulles » par Daniel Torres
Ramon Sanchez se questionne sur le monde qui l’entoure et tente de trouver des réponses à ses interrogations… devant un aquarium : là où le mutisme et les bulles provoqués par les poissons peuvent lui permettre de se laisser aller à ses pensées et à la constatation des pertes accumulées depuis l’âge de ses vingt ans. À travers la remise en question et l’introspection menée en profondeur d’un quadragénaire attachant, ce délicat et habile roman graphique en noir et blanc alterne nostalgie et onirisme, mais se révèle surtout plein de finesse, d’humour et de singularité…
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« Ratafia T7 : Un besoin de consolation » par Johan Pilet et Nicolas Pothier
C’est la rentrée pour tout le monde. Même le Capitaine de la Kouklamou doit reprendre la barre. Mais un problème est survenu pendant ces vacances. Romuald, le second, et l’équipage ont fait du zèle. Ils ont arraisonné un grand nombre de navires, remplissant la cale d’un impressionnant butin. Alourdie par les richesses, la Kouklamou prend l’eau. Insidieusement, des infiltrations ont inondé la bibliothèque du Capitaine abîmant définitivement ses livres, mais aussi « Consolation » : un ouvrage sur le chocolat se lisant d’une main, emprunté à la bibliothèque des pirates…
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« Le Linge sale » par Sébastien Gnaedig et Pascal Rabaté
Peut-on qualifier Pascal Rabaté d’auteur régional ? Pas vraiment, mais comme il aime bien mettre en scène des personnages hauts en couleurs issus des classes populaires rurales et qu’il en côtoie pas mal dans son coin des Pays de la Loire, pourquoi ne décrirait-il pas ces gens qu’il connaît bien et qui évoluent tout près de chez lui ? Ceci dit, pour cette nouvelle grinçante comédie sociale (où il a eu recours au dessin sobre, mais très efficace, de celui qui n’est autre que son directeur éditorial sous d’autres cieux : Sébastien Gnaedig des éditions Futuropolis), il se délocalise légèrement d’une cinquantaine de kilomètres, délaissant la belle ville d’Angers où il réside encore et son Tours natal pour Cholet, dans le Maine-et-Loire. Le résultat : un polar théâtral aussi sombre que truculent, saupoudré de pincées d’humour et de suspense fort bien dosées.
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« Le Teckel » par Hervé Bourhis
Un jeune visiteur médical et un vieux routier de la profession sont contraints de partir ensemble en tournée pour tenter de placer, auprès des professionnels de la santé, la nouvelle version d’un traitement antidouleur soupçonné d’avoir causé, auparavant, des centaines de morts. Tiens, tiens ! Cela ne vous rappelle-t-il pas l’affaire du Médiator ou des laboratoires Servier ? Certes… Sauf, qu’ici, l’auteur bordelais Hervé Bourhis (dont on salue le retour à la bande dessinée proprement dite, après un petit détour vers l’illustration du monde du rock et de la gestion d’évènements dans le milieu musical) nous assène, avec brio, une comédie de mœurs aussi décapante que cynique située, évidemment, dans l’univers impitoyable des laboratoires pharmaceutiques…
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« Cœur glacé » par Johan De Moor et Gilles Dal
Alors que Le Lombard réédite en intégrales, dans le même laps de temps, les enquêtes décalées de sa mythique « La Vache » (créée avec Stephen Desberg au scénario dans les pages du mensuel (À suivre) en 1992), Johan De Moor, célèbre et acerbe dessinateur humoristique de presse en Belgique, et éventuellement fils de Bob De Moor (paternel qu’il rejoindra au sein du studio Hergé au début des années quatre-vingt pour développer, entre autres, « Quick et Flupke » pour l’animation) revient sur la scène bande dessinée, qu’il avait délaissée depuis pas mal de temps, avec cette émouvante fable sur le travail, la famille, les rapports humains, la vie… Et surtout la mort !
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« Mort au tsar T1 : Le Gouverneur » par Thierry Robin et Fabien Nury
Après les deux volets de « La Mort de Staline », le scénariste Fabien Nury et le dessinateur Thierry Robin continuent de nous fasciner avec la dimension baroque et fondamentalement excessive de l’histoire de la Russie. Ils reculent un peu dans le temps pour nous raconter, cette fois-ci, l’attentat contre le Grand-Duc Sergueï Alexandrovitch, en 1905 : un événement raconté selon le point de vue de la victime et de l’aristocratie, pour ce premier tome, et selon celui du terroriste et de sa bande de tueurs dans le second. Ils dressent, surtout, le portrait contradictoire, car complexe, d’un homme dont la folie antisémite et la disparition annoncée sont les prémices de la fin d’un monde et d’une dynastie à bout de souffle.
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« Broadway : une rue en Amérique » par Djief
Après l’exploration de divers univers fantastiques ou d’anticipation (« Tokyo Ghost », « Le Crépuscule des dieux » et « White Crow » chez Soleil) ou encore historiques (« Saint-Germain » chez Glénat qu’il a signé de son vrai nom Jean-François Bergeron), le Québécois Djief retrouve l’ambiance des films musicaux hollywoodiens à grand spectacle ou des tragicomédies sociales à la Frank Capra : assumant, avec brio, les dessins et le scénario de ce divertissant diptyque sur la plus animée des avenues new-yorkaises pendant les années folles…
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« Carnation » par Xavier Mussat
Dessiner les sentiments n’est pas à la portée du premier bédéaste venu. Xavier Mussat a créé son propre langage graphique pour disséquer une histoire d’amour destructrice, vécue au tournant des années 2000. Dans cette autofiction, l’introspection n’entend pas se limiter à un exercice narcissique, mais cherche la plus grande justesse dans la mise en scène de la pensée. Le résultat est bouleversant, poignant, profondément humain.
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