Après deux ans d’absence, Mathieu Lauffray conclut le cycle « Raven » avec ce copieux (84 pages) troisième volume. Dans la lignée de son « Long John Silver », scénarisé par Xavier Dorison, le dessinateur — qui sait si bien mettre en scène pirates, mer déchaînée, ambiances gothiques ou menaçantes — revient en soignant son final.
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Dès la couverture, un type, un revolver à la main et adossé à un camion rouillé, en plein désert salin, a l’air d’avoir des problèmes. Et ce n’est pas ce gamin, qui nous regarde, juché sur le toit de la cabine, qui pourrait dire le contraire. Le type s’appelle Tango : surnom (évidemment), de ce gringo mystérieux rassuré d’être seul et loin de tout dans la Cordillère des Andes. Seul, mais pas pour bien longtemps…
Tango se serait bien arrêté là , à pisser sur les lézards et à draguer la serveuse du bar de ce petit patelin sud-américain. Agustina est belle, veuve en plus, pourquoi se priver ? Mais le problème des héros, c’est que la vie ne les laisse jamais tranquille et que le passé les rattrape forcément un jour ou l’autre. Et un de ces jours est arrivé ! Et doublement : d’une part, parce qu’il joue les grands frères protecteurs d’un petit Diego, dont le paternel va avoir des problèmes ; d’autre part, parce que venu tout droit du passé, un trio d’anciens collègues particulièrement décidé à lui faire rendre des comptes ne va plus le lâcher… Finie pour lui la vie pépère au fin fond de la Puna : le sombre héros solitaire, mixte du beau gosse et du sale gosse, costaud et peu sentimental, avec ses zones d’ombre et ses péchés de jeunesse, entre en scène…
Du coup, les deux trames présente et passée se mêlant, la vie devient compliquée pour John, dit Tango, qui, heureusement, sait se servir de ses poings et d’une arme. C’est là qu’on comprend qu’il n’est pas n’importe qui, le Tango ! Mais de quel bord ? Un vrai méchant ? Un faux gentil ? Il va de soi que ce premier tome ne dit pas tout et que les révélations ne font que commencer au fil d’un premier épisode, qui constitue tout de même un récit complet, façon polar, mené tambour battant dans un décor nu et somptueux.
« Tango » n’est à l’évidence pas argentin, c’est tout de même par là -bas que commence l’histoire, plus exactement en Bolivie dans le désert qui jouxte le Chili et la Bolivie, ce fameux désert d’Atacama dont l’altitude (plus de 4 000 mètres) et l’incroyable dénuement fait fantasmer n’importe quel voyageur et tout lecteur qui aime voyager en cases pittoresques. Les auteurs n’ont pas localisé précisément leur récit, mais le dossier photographique qui l’accompagne donne quelques clés : La Paz et la fameuse montagne du Potosi pour la Bolivie, le lac Titicaca pour le Pérou, le lac salé d’Uyuni… Les dessins réalistes de Xavier font honneur à ces contrées desséchées, à ces canyons piquetés de cactus géants, sous un ciel intensément limpide.
On l’aura compris, les auteurs renouent ici avec les récits d’aventures et d’action centrés sur un héros, somme toute, classique  et au fort potentiel dynamique. On pense inévitablement à Bernard Prince (Anselmo est d’ailleurs un clin d’œil à Barney Jordan), à des décors façon « Largo Winch », plus généralement au western… mais la suite serait plutôt située aux Bahamas ! Après les déserts, la plage !
Alors, bon voyage !
Didier QUELLA-GUYOTÂ ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).
http://bdzoom.com/author/didierqg/
« Tango T1 : Un océan de pierre » par Philippe Xavier et Matz
Éditions Le Lombard (14, 45 €) – ISBN : 978-2-8036-3708-9