Le premier tome de « L’Ombre des Lumières » sorti l’an passé (1) se terminait par le départ, en ce milieu du XVIIIe siècle, du malfaisant chevalier de Saint-Sauveur pour le Nouveau Monde. En effet, toutes ses intrigues se sont retournées contre lui ! Après avoir séduit et trompé la jeune Eunice de Clairefont éprise de la philosophie des Lumières, menacé de mort par son mari et criblé de dettes, Saint-Sauveur a été obligé de s’exiler. En débarquant à Québec, il ne désespère cependant pas de retrouver sa place à Versailles, d’autant plus qu’un de ses peu fréquentables amis lui a proposé d’effacer toutes ces dettes s’il accepte de réaliser une mission vengeresse qui va lui permettre de déployer ses funestes talents…
Lire la suite...« Bravo pour l’aventure » par Alex Toth
Alex Toth, dessinateur né en 1928 et décédé en 2006, est considéré par les amateurs de comics de l’âge d’or et par tous les amateurs de beau dessin et du noir et blanc comme une référence du médium de la bande dessinée. S’il n’a cependant pas laissé une œuvre aussi conséquente ou visible que l’un de ses aînés et mentors : Milton Caniff par exemple, auprès duquel, avec Noel Sickles, on pourrait le situer, graphiquement parlant, la plupart de ses travaux publiés en France montrent la qualité de son talent. C’est particulièrement le cas de l’album culte « Bravo pour l’aventure », publié en 1981 chez Futuropolis que les éditions Paquet rééditent enfin, pour notre plus grand plaisir, dans deux très belles éditions enrichies, en couleurs et noir et blanc.
Ce récit d’un pilote romantique et bagarreur : Jesse Bravo, se déroulant dans l’Amérique d’après- guerre est intimement lié aux éditions Futuropolis. Celles-ci furent en effet les premières à éditer deux albums de l’auteur dés 1981, dont celui consacré au héros, tandis que l’autre volume : « Comique mécanique » regroupait des histoires d’horreur ou policières des années 1960/1970 éparpillées dans les revues Creepy, Metal hurlant et L’Écho des savanes spécial USA. L’histoire de cette publication a déjà été contée en détail en 2015 par Jean Depelley, suite au beau travail de restauration effectué par les éditions IDW, mais il ne sera pas inopportun d’en reparler un peu (http://bdzoom.com/88489/patrimoine/bravo-pour-l%e2%80%99aventure/).
« Bravo pour l’aventure », tel que raconté par Dean Mullaney dans sa préface, est avant tout le désir de raconter un récit de forme classique pour Alex Toth. Ne se reconnaissant pas dans la médiocrité de la majorité des comics strip des années cinquante et dans leur industrie qui laissait peu de place aux scénaristes aventureux, et encore moins dans la mode systématique des anti-héros des années soixante-dix, il décide de se lancer dans une histoire personnelle. S’il choisit de rendre hommage aux grands classiques qu’il affectionne, tels « Terry et les pirates » de Milton Caniff, il a du mal à trouver un éditeur aux USA et se tourne vers l’Europe, alors en plein bouillonnement créatif et de défense du médium.
Ce superbe récit sorti d’un autre âge possède toutes les composantes de l’histoire qu’Alex Toth désirait réaliser ainsi que toutes ses qualités intrinsèques : un héros, une pépée magnifique, des amis et de la fraternité, des brigands, du suspens, des coups de feu, des courses poursuites, des cabrioles, des explosions, une morale, et des dessins à couper le souffle. En cela, on peut facilement reconnaître dans le « Rocketeer » de Dave Stevens, un autre grand, mais plus jeune qui lui succéda (Albin Michel, 1985), un hommage à peine voilé à cet album unique, même si leurs auteurs puisent tous deux leurs références aux mêmes sources des années quarante/cinquante.
« Bravo pour l’aventure » aurait dû ou pu être une série. Alex Toth l’avait clairement laissé entendre en appelant les lecteurs à réagir en fin d’histoire, mais le destin en a voulu autrement. Il avait aussi envisagé l’édition couleur de son héros, mais les quelques essais restèrent au placard pour diverses raisons qui sont aussi expliqué dans cette préface. Le résultat est franchement agréable, même si les puristes préfèreront la version noir et blanc, particulièrement délicieuse dans cette version « nettoyée » tout à fait remarquable.
Quarante ans plus tard, et à l’occasion des dix ans de la mort de leur créateur, il est donc enfin temps de rediriger la lumière et la couleur sur Jesse Bravo et ses compagnons, et de rendre hommage par la même occasion à ce grand monsieur de la bande dessinée qu’était et que reste Alex Toth. Les éditions Paquet l’incluent dans leur collection Cockpit consacrée à l’aviation. Quel plus bel hommage ?
Franck GUIGUE
« Bravo pour l’aventure » par Alex Toth
Éditions Paquet
- Une édition limitée à 800 exemplaires, grand format (37 x 28 cm – 96 pages – 35 € – ISBN : 9782888908944), reprenant la totalité de ce qui a été publié dans l’édition Magnum d’IDW, en 2016. La totalité des planches (69) en noir et blanc des aventures de Jesse Bravo, avec une traduction revue par rapport à l’édition Futuropolis de 1981. Le tout est accompagné de croquis, esquisses, tests de couleur réalisés par Alex Toth, ainsi que d’une préface écrite par Dean Mullaney, trois fois récompensé aux Eisner Awards pour son travail autour des oeuvres d’Alex Toth.
- Une édition classique, intégrée à la collection Cockpit (32 x 24 cm – 80 pages – 19 € – SBN : 9782888908937). Cette édition comprend la totalité des planches mises en couleur pour la première fois, par Fabien Alquier, en respectant les instructions d’époque d’Alex Toth, et sous la supervision d’IDW, des héritiers d’Alex Toth et de Dean Mullaney. Une petite partie croquis et esquisses complète cette édition.
De mon point de vue, effectivement, l’art de Toth fonctionne mieux en noir et blanc. On n’imagine pas Scorchy Smith ou Buz Sawyer, qui sont ses influences, colorisés. De même que Gene Colan, Jack Kirby ou Steve Ditko dont la puissance des dessins s’exprime librement sans les couleurs pauvrement appliquées de certaines éditions originales ou les marrons jaunâtres appliqués par ordinateur de certaines des planches reproduites ici. Sur une page de Toth, c’est non seulement superflu mais cela atténue la portée et l’impact du trait, ce qui est un crime, de mon point de vue.
Naturellement, si Alex Toth a si peu produit, c’est parce que pendant des années il a travaillé pour les plus célèbres studios d’animation américains, responsable du design de beaucoup de séries d’aventure de notre enfance (Space Ghost, Birdman, Tarzan et tant d’autres) dans lesquelles on reconnait son trait souple et dynamique.
La colorisation semble des plus réussies…
BRAVO POUR L’AVENTURE devait paraitre dans l’ephemere collection parue chez Nathan par l’entremise de Bernard Farkas, qui parut avant Metal hurlant, quand nous premarions le mort-nez SNARK.
Il y eut bien « Robin des Bois » de Victor de la Fuente et « Vingt-mille lieux sous les mers » de l’ex-copain d’école de Tardi le lyonnais Gasquet. Toth, en retard, fut reporté et mis entre parenthéses.
Nous nous brouillames, après une belle amitié ! Je lui envoyais tous les maitres qui l’interessait : Poîvet, Gillon, Gir-Moebius….
J’aurais du savoir : tous, dont Infantino, Kubert, me demendaient tout le temps si ça se passait bien avec Alex qui m’envoyait des lettres magnifiques, en partie dessinées, que j’ai quelque part.
Amitiés
Jean-Pierre Dionnet
Merci, Jean-Pierre de ce joli témoignage. On aimerait bien voir ces lettres…. Laurent
Les humanos ont depuis longtemps jetés les archives.
Merci de cette anecdote Jean Pierre
Merci JC pour ce commentaire informatif bienvenu.
NON ! QUELS CONS !
P.