Yannick Corboz (1), déjà remarqué pour ses « Célestin Gobe-la-Lune » et « L’Assassin qu’elle mérite » avec Wilfrid Lupano, sa version BD des polars à succès de Pierre Lemaître (« Brigade Verhoeven ») avec Pascal Berho ou son diptyque « Les Rivières du passé » avec Stephen Desberg, s’est attaqué à la mise en cases du roman sombre, fantasque, historique et romantique du célèbre avocat Richard Malka : « Le Voleur d’amour », sorte de retranscription du mythe de Dracula et de la jeunesse éternelle, publié chez Grasset en 2021. Le résultat, qui privilégie le narratif sur le plan des textes, est graphiquement lumineux et éblouissant…
Lire la suite...« Chroniques du léopard » par Tehem et Apollo
Comme c’est la rentrée des classes, autant voyager dans le monde scolaire… Mais à La Réunion… Et pendant la Seconde Guerre mondiale ! C’est ce que proposent Apollo et Tehem qui, non seulement connaissent bien l’enseignement et l’île de La Réunion mais qui ont choisi de mêler leurs souvenirs personnels à une fiction passionnante, restituant l’ambiance coloniale et le contexte guerrier.
On est au lycée Leconte-de-Lisle à Saint-Denis, le lycée de la capitale qui réunit, en 1941, les Blancs et beaucoup plus rarement les autres. Charles et Lucien sont deux amis rêveurs et littéraires, qui se prennent pour Rimbaud, Cendrars, Monfreid, Tarzan ou Tintin selon ce qu’ils lisent ou voient. On assiste d’abord à cette vie d’interne pesante (le surgé est des plus déplaisants !) qui pousse à passer le mur, la nuit, pour aller fumer et retrouver d’autres adeptes du « Nouveau Parnasse », le petit groupe d’adolescents intellos.
Il y a heureusement des nouveaux venus qui changent la donne, non sans subir un racisme appuyé, et les anciens qui deviendront des têtes connues : Raymond Barre le gourmand ou les frères Vergès, très légalistes. Autour d’eux, ça se chamaille, ça s’affronte, ça se bagarre. Lucien n’est pas très bon en cours, ni très discipliné, mais il a un point fort : il dessine, notamment des filles bien roulées dont il fait commerce avant de lancer l’idée d’un groupe révolutionnaire réunionnais : le GRR !
Avec Lucien, on parcourt Saint-Denis, ses différents quartiers, de la ville résidentielle (la « ville – jardin ») et blanche aux quartiers populaires, animés et métissés. Puis, un peu plus loin, la plaine des Cafres qu’on dit « loin » de Saint-Denis, à l’époque ! Julien découvre dans « les hauts » le brouillard, la fraicheur, la montagne en un mot, et une cousine éloignée fort jolie ! Puis, au-dessus de Saint-Denis, Le Brûlé, « royaume des fleurs et des oiseaux », ses cascades, sa forêt… sa pauvreté. Saint-Gilles, aussi, qu’on atteint en train, les bains de mer, le canotage, les filaos et le créole dont l’album n’abuse pas mais qu’il distille dans de temps en temps (avec deux pages de glossaire en fin d’album)…
Mais ce qui éveille les consciences, titille les esprits, nourrit les ambitions, c’est la guerre. Dans une île où le Gouverneur est pétainiste, communistes et Gaullistes s’impatientent tandis que des ados imaginent force sabotages et actes de résistance. Quand les Anglais débarquent à Madagascar, on s’attend sur l’île à du nouveau : si le « petit peuple » ne s’affole pas, ça s’agite du côté des « collabos » qui se réfugient à Salazie.
C’est avec beaucoup d’humour et de vie (pittoresque) que les auteurs saluent l’île qu’ils connaissent intimement, réalisant un récit séduisant, attachant et très riche, où scénario et dessin tissent une belle complicité, offrant au passage un joli pastiche du « Lotus Bleu » ou une attaque très réussie de guerriers en tous genres : kafs marrons, planteurs tamouls, piroguiers mozambiques, cavaliers berbères… Apollo qui a déjà signé les scénarios des savoureux « Commando colonial », « La Grippe coloniale » ou « Ile Bourbon 1870 » (à lire ou relire évidemment !) et Tehem (brillant auteur de « Malika Secouss » ou « Zap College ») se sont manifestement délectés à concocter cette histoire qui leur ressemble probablement beaucoup et qui n’intéressera pas que les natifs, loin de là !
« Bon, marmailles, arêt kasse la blague, il faut nous rant la kaz » !
Alors, bon, voyage !
Didier QUELLA-GUYOT ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).
http://bdzoom.com/author/didierqg/
« Chroniques du léopard » par Tehem et Apollo
Editions Dargaud (19, 99€) – ISBN : 978-2-2050-7789-6
Il semblerait que Dargaud ait perdu sa palette de couleurs, hormis la trompeuse couverture polychrome? … Mais Dargaud n’a pas oublié son tiroir-caisse: le coût de ce livre, c’est 20 euros, tout de même…
La couverture est polychrome c’est un rouge orangé en lien chromatique avec un ajout de couleur complémentaire.
Sur les pages présentées, la séquence se passe la nuit donc bleu pas besoin d’en faire plus.
l’album fait 196 pages ce qui fait l’équivalent de trois albums normal donc ça se tient pour le prix.
il faut apprendre et lire la bd avant d’émettre un avis à l’emporte pièce.
Concentrez vos commentaires sur les chaussures ou les Ceintures abdominales, là c’est parfait