C’est avec exigence qu’Emmanuel Moynot construit, depuis une quarantaine d’années, une riche carrière où se côtoient des albums classiques (sa reprise de « Nestor Burma », par exemple) et des one-shots aux motivations plus ambitieuses, tel le présent album. Un polar noir et cynique où il établit avec force détails le parallélisme entre le quotidien des babouins africains et le comportement parfois violent de certains individus de notre monde contemporain.
Lire la suite...« Fraternity » T1 par J. L. Munuera et J. D. Canales
Voici une curieuse bande dessinée, à la fois aventure historique et récit fantastique, basée sur les utopies sociales du XIXème siècle et se déroulant en 1863, en Amérique, en pleine guerre de Sécession.
Dans une petite communauté de l’État d’Indiana, créée par un groupe d’hommes et de femmes idéalistes qui souhaite éliminer la propriété privée, en mettant en commun les ressources et en répartissant le travail entre tous, des dissensions commencent à apparaître : surtout quand une femme leur impose la présence d’un « enfant sauvage » découvert dans la forêt voisine. D’autant plus qu’un monstre, qui semblait veiller sur lui, aurait été aperçu au moment de sa capture… Et pour finir de tout arranger, cinq ans après ces évènements, c’est l’arrivée d’un groupe de déserteurs qui risque de mettre un terme à tous ces espoirs d’autonomie que de grosses difficultés financières mettent sérieusement à mal !
Manifestement, avec cet oppressant diptyque philosophique (dont la suite et fin et annoncée pour la fin de l’année), l’Espagnol Juan Díaz Canales nous montre bien qu’il est un scénariste d’exception. Ne se limitant pas aux enquêtes de son célèbre « Blacksad », il collabore, aujourd’hui, avec un autre étonnant dessinateur d’origine ibérique : Jose Luis Munuera. Ce dernier réussit, ici, à se dégager de son trait « cartoonesque » en proposant des personnages toujours en mouvement et aux faciès très expressifs, évoluant dans des décors réalistes, un peu dans la lignée de son travail précédent : « Le Signe de la lune » (également chez Dargaud).
Son superbe trait, qui s’éloigne donc de plus en plus de ce qu’il a pu faire sur « Spirou et Fantasio », sur « Merlin » ou sur « Nävis », participe entièrement à la narration et à la mise en scène efficaces de ce western social, aussi sombre que déroutant, car flirtant avec l’horreur et le surnaturel !
Gilles RATIER
« Fraternity » T1 par Jose Luis Munuera et Juan Díaz Canales
Éditions Dargaud (13,95 €)