Revenant au dessin et aux fondamentaux de ses débuts — à une époque où il privilégiait la gaudriole, le grand guignol et la liberté graphique, ce qui était notamment le cas dans le recueil intitulé « Nocturnes » —, Régis Loisel nous gratifie d’un étonnant et magnifique album, de très belle facture, aux éditions Rue de Sèvres : « La Dernière Maison juste avant la forêt », avec l’aide scénaristique de son ami Jean-Blaise Djian. Une histoire foisonnante — de 160 pages — située dans un univers loufoque, délirant, aux limites du fantastique, mais qui est remplie de bons sentiments, et où l’on retrouve tout l’amour pour l’humanité du cocréateur de « La Quête de l’oiseau du temps » ou de « Magasin général » !
Lire la suite...« Un amour exemplaire » par Florence Cestac et Daniel Pennac
Le Pennac voudrait bien que sa copine Cestac lui dessine une histoire d’amour, mais l’auteure du « Démon de midi », plutôt méfiante, n’est guère friande des romans à l’eau de rose. Pourtant, quand il lui raconte — et le Pennac, il raconte plutôt bien — sa rencontre avec un vieux couple étonnant qui ne travaillait pas, mais qui n’était pas vraiment doué pour l’ennui, qui n’avait pas d’enfants, mais qui était toujours aussi amoureux qu’à leur première rencontre…, elle est enthousiaste. Elle ira même jusqu’à dessiner des trucs dont elle a horreur (un chauve et des bagnoles) et à s’offrir une petite rupture style sur le gros nez du dernier rejeton des Bozignac.
Le célèbre romancier, créateur entre autres du personnage de Malaussène, réussit donc à lui faire illustrer la vie aussi émouvante qu’amusante de Jean et Germaine : lui, grand bonhomme flanqué d’un physique ingrat et ex-marquis répudié par sa famille (il s’équipe toujours d’un monocle, vestige d’une époque révolue), et elle, petite bonne femme frisée et rigolote, fille de chiffonnier qui a fait exploser les fiançailles de son nobliau avec la fille du roi d’Alsace.
Ce couple improbable vivait dans une petite baraque, à la Colle-sur-Loup, dans l’arrière-pays niçois, près de la maison de la grand-mère du jeune Pennac où ce dernier passait ses vacances pendant son enfance. Il allait très souvent chez eux, les harcelant de questions du style « c’est vrai que Jean n’a jamais travaillé ? » (en fait, il gagnait de l’argent en jouant aux cartes) : réponse, « mon garçon, en amour le travail est une séparation ». Ou encore, « pourquoi vous n’avez pas d’enfants ? » : « En amour, pas d’intermédiaire ! » s’écriaient-ils alors en chœur tous les deux !
Vous l’avez compris, truculence et émotion sont au rendez-vous de cette formidable évocation, vraiment rafraîchissante, où l’on se marre pratiquement tout le temps, mais où l’on se surprend, de temps en temps, à avoir aussi une petite larme qui coule à l’œil…
Gilles RATIER
« Un amour exemplaire » par Florence Cestac et Daniel Pennac
Éditions Dargaud (14,99 €) – ISBN : 978-2205-07332-4












Indémodable, La Cestac !