« Les Aventures de Gérard Crétin » est une bande dessinée en une page proposée dans le mensuel Mikado des éditions jeunesse Milan, entre 1989 et 1994, et c’est la première série de gags que l’immense Florence Cestac (1) a créée spécifiquement pour la presse ! Son antihéros a tendance à être vantard et gaffeur : il croit souvent savoir tout faire mieux que les autres et être le meilleur en tout… Mais il est quand même attachant, car terriblement naïf ! Ainsi, il enchaîne les situations hilarantes et embarrassantes, incarnant, avec une tendre absurdité, certains travers humains. Le trait de la reine du gros nez en BD y est déjà unique, même si elle juge avoir fait quelques progrès depuis. Mais comme le dit elle-même : « un petit coup de nostalgie, ça ne peut pas faire de mal ! »
Lire la suite...« Natures mortes » par Oriol et Zidrou

La Barcelone moderniste de la seconde moitié du XIXe siècle a engendré de nombreux peintres talentueux qui ont marqué l’histoire de l’art. Dans ce superbe album remarquablement mis en images par l’Espagnol Oriol (voir « La Peau de l’ours » ou « Les Trois Fruits » avec le même complice au niveau de l’écriture des textes), le scénariste Zidrou s’efforce de réhabiliter un certain Vidal Balaguer (1873 — ?) qui n’a jamais rencontré la reconnaissance qu’il méritait. Mais ce Balaguer a-t-il vraiment existé ?
Étudiants bohèmes de l’école des Beaux Arts, Vidal et son ami Joaquín Mir i Trinxet fréquentent le fameux cabaret-galerie Els Quatre Gats. Exceptionnellement doué, mais criblé de dettes, ce jeune Catalan qu’est Balaguer refuse de vendre à un riche collectionneur le portrait qu’il a fait de la pulpeuse Mar : son amour disparue quelques mois plus tôt de façon incompréhensible, sans laisser la moindre trace…
Le policier chargé de l’enquête n’est guère convaincu par la fusion passionnelle exercée entre les deux êtres et soupçonne l’artiste d’être le responsable de la disparition de la jeune et belle femme, d’autant plus qu’il est la dernière personne à l’avoir croisée. Curieusement, il est aussi le dernier à avoir vu un cadavre dont il a juste exécuté le portrait mortuaire, comme s’il avait le pouvoir de supprimer ceux qu’il couche sur ses toiles. Balaguer mentionne d’ailleurs cette interrogation dans une lettre destinée à son collègue et compagnon de fortune Joaquín Mir, allant jusqu’à parler de crimes picturaux… juste avant sa propre disparition.
Ce magnifique récit sur les faux-semblants et le pouvoir de l’illusion, parfaitement maîtrisé sur le plan de la narration et des dialogues, est l’occasion, pour Oriol, de nous éblouir avec des décors propices à la toute-puissance de l’imagination, avec des toiles — peintes soi-disant par Balaguer — de toute beauté, ou avec des personnages fascinants, tous mis en lumière par de somptueuses et dynamiques couleurs directes : une véritable réussite !
(1) Oui, on le sait, sur Bdzoom.com, on aime beaucoup les scénarios de Zidrou… Comme le prouvent nos récents articles sur : « Shi T1 : Au commencement était la colère… » par José Homs et Zidrou, « Le Spirou de… T10 : La Lumière de Bornéo » par Frank Pé et Zidrou, « Les Beaux Étés T2 : La Calanque » par Jordi Lafebre et Zidrou, « Un tout petit bout d’elles » par Raphaël Beuchot et Zidrou, « L’Adoption : Qinaya » T1 par Arno Monin et Zidrou, « Clifton T22 : Clifton et les gauchers contrariés » par Turk et Zidrou, etc.
« Natures mortes » par Oriol et Zidrou
Éditions Dargaud Benelux (14,99 €) – ISBN : 978-2-5050 — 6801-3