Avec « Le Tombeau des chasseurs », le talentueux Victor Lepointe évoque la tragédie collective d’une bataille vosgienne en 1915 et, plus encore — par le regard de l’un d’eux, Victor Granet —, scrute l’intimité des sentiments de ces chasseurs alpins sacrifiés. Plongée dans la si mal nommée Der des ders…
Lire la suite...Un petit trek himalayen pour commencer 2019 ?
Connaissez-vous le peuple Kalash ? C’est peu probable puisqu’il s’agit d’une minorité d’environ 3000 personnes vivant dans des vallées reculées au nord-ouest du Pakistan, près de la frontière Afghane. Le passionnant « Fêtes himalayennes – Les derniers Kalash » nous en apprend beaucoup sur cette communauté et ce n’est pas pour rien que cet album constitue le catalogue de l’exposition que leur consacre jusqu’à fin 2019 le Musée des Confluences de Lyon…
Dans les années 70, il n’existe presque rien sur les Kalash. L’ethnologue Jean-Yves Loude et les photographes Hervé Nègre et Viviane Lièvre décident donc de se rendre au Pakistan pour découvrir ce peuple que Kipling a mis en scène dans « L’Homme qui voulut être roi » sans pour autant le rencontrer. Les trois amis abandonnent leurs emplois respectifs pour écrire le livre qui manque sur le sujet et réaliser un « rêve littéraire, ethnologique et photographique ».
Après les avoir rencontrés une première fois en 1978, ils décident de revenir deux ans plus tard pour vivre avec eux suffisamment longtemps pour vraiment les connaitre. Les Kalash sont en effet réputés pour ne ressembler à aucun de leurs voisins : leurs traditions, leurs modes de vie, leur langue… rien de commun. Ni musulmans, ni bouddhistes, ni hindouistes, ils sont cependant imprégnés de croyances ancestrales et de dieux tutélaires.
Pour comprendre ces traditions et pouvoir les expliquer aux occidentaux, les trois voyageurs s’intègrent au maximum, s’habillant comme eux, vivant comme eux, Viviane Lièvre acceptant même les contraintes inhérentes aux femmes. Le moins qu’on puisse dire est qu’en effet, là comme souvent ailleurs, les femmes n’ont guère la meilleure place ! Les rituels et les nombreux interdits les concernant les condamnent à des isolements souvent en raison de leur « impureté ». Les problèmes leurs sont souvent attribués, les chamanes les accusant volontiers de sorcellerie.
S’immergeant sans compter pour vivre au plus près, les auteurs s’attachent aussi à évoquer les fêtes, notamment la fête du printemps, les prières pour la fertilité de leurs cultures ou les sacrifices animaliers. Après un premier reportage publié dans Géo, les auteurs reviennent en 82 pour passer un second hiver chez les Kalash, autant dire qu’en matière de spécialistes, on ne peut guère trouver mieux. On comprend l’inquiétude des auteurs sur les menaces actuelles pesant sur ce peuple, notamment celles des Talibans et « l’influence du voile qui se fait de plus en plus sentir »…
L’album alternant dessins et photos, les imbriquant savamment, savoureusement, retrace ces moments saisis sur le vif, une vitalité que le trait d’Hubert Maury rend incontestablement palpable, tant son style expressif, rehaussé brillamment par les couleurs de Philippe Marlu, est dynamique. On lui doit déjà « Le Pays des purs » que nous avons chroniqué ici-même, un album déjà consacré au Pakistan, également remarquable par son traitement et son contenu.
Didier QUELLA-GUYOT ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).
http://bdzoom.com/author/didierqg/
« Fêtes himalayennes – Les derniers Kalash »
Hubert Maury, Jean-Yves Loude, Hervé Nègre…
La Boite à Bulles (18 €) – ISBN : 978-2-84953-320-8