Commencée en décembre 1975 dans le premier numéro d’Imagine, « La Quête de l’oiseau du temps » trouve 50 ans plus tard la conclusion… du second cycle : « Avant la quête ». Et Serge Le Tendre et Régis Loisel — avec la complicité de Vincent Mallié — réussissent la performance de réunir magistralement les deux époques. Encore une série culte des années fastes de la « nouvelle BD » des années 1970 qui se porte à ravir ! D’autant plus qu’à « Avant la quête » pourrait succéder « Après la quête » : un volume unique que Régis Loisel a encore tout récemment évoqué en interview (ou en privé), qu’il devrait dessiner lui-même et qui mettrait la focale sur l’errance d’un Bragon âgé et perdu dans sa folie.
Lire la suite...« C’est aujourd’hui que je vous aime » : les années Giscard vues par François Morel et Pascal Rabaté…
Voilà un album rafraîchissant qui, à travers les premiers émois amoureux d’un adolescent, François Morel, invite le lecteur à revenir quelques décennies en arrière, au temps déjà lointain des années de la présidence de Valéry Giscard D’Estaing. Une agréable promenade nostalgique où tout sonne juste, scénario comme dessin. Peut-être votre madeleine à vous…
Isabelle Samain, un prénom et un nom que répète sans relâche le jeune narrateur dont l’identité demeure mystérieuse, probablement François Morel lorsqu’il avait 12 ans. Amoureux fou de la jolie adolescente a qui il n’a jamais osé déclaré sa flamme, il la suit dans la rue, à l’école, à la piscine ou au tennis. Il pousse le fétichisme jusqu’à conserver pieusement dans un tiroir une mèche de ses cheveux trouvée entre les dents d’un peigne, un crayon mordillé, une socquette égarée, la photo de classe ou encore un papier froissé. Devenue une véritable obsession, il tente tout pour l’oublier, même un voyage en Angleterre avec des copains. Quoiqu’il arrive pour lui l’élégance, la beauté, le charme absolu, l’amour avec un grand A c’est Isabelle Samain. François Morel raconte avec des mots simples comment il difficile d’aimer pour la première fois lorsque vous êtes un adolescent timide follement épris d’une fille dont vous prononcez le nom en boucle comme un refrain.
C’est sans vulgarité ni mièvrerie que ces amours adolescentes sont évoquées en toute simplicité. Simplicité qui ne signifie pas ennui, bien au contraire, on suit avec délectation les pérégrinations du jeune garçon où se mêlent tendresse et humour. À l’histoire s’ajoutent mille petits détails de la vie au quotidien au cours des années 70 judicieusement saupoudrés au fil des pages : évocation d’un feuilleton fameux à la télévision, des bandes dessinées de l’époque, de Danielle Gilbert, de Godard qui vient de sortir « Le Mépris », des posters de Mike Brant, des mobylettes et des 4 L… Ultime raffinement, l’album lui-même adopte pages de garde et dos de couverture d’un album des aventures de « Tintin ». Vous l’aurez compris la nostalgie est au rendez-vous de cet ouvrage qui s’adresse à un large lectorat de 7 à 77 ans.
Acteur, auteur, chroniqueur, François Morel, découvert avec la série télé « Les Deschiens », propose une histoire sur mesure à Pascale Rabaté qui adopte un trait plein de fantaisie inspiré par les bandes dessinées populaires de l’époque. Ne souriez pas, il me fait parfois penser aux images du délicieux Jean Trubert et c’est un compliment. Nous sommes loin du fabuleux « Ibicus » ou de ses travaux plus récents dont le lectorat est plus ciblé. « C’est aujourd’hui que je vous aime » est une escapade joyeuse aux sources d’une jeunesse insouciante dans une France qui vivait encore les « trente glorieuses ».
Henri FILIPPINI
À noter : Pascal Rabaté sera l’invité d’honneur du 13ème carrefour européen du 9ème art et de l’image, qui se déroulera à Aubenas les 23 et 24 mars.
« C’est aujourd’hui que je vous aime » par Pascal Rabaté et François Morel
Édition Les Arènes (18 €) – ISBN : 978 2 7112 0009 2
Si je ne m’abuse, Le Mépris date de 1963…