Aviez-vous, jusque-là, entendu parler d’Eadweard Muybridge ? Certainement pas, ou si peu ! Grâce à Guy Delisle — auteur québécois célèbre pour ses bandes dessinées autobiographiques (dont « Pyongyang », « Chroniques birmanes », « Chroniques de Jérusalem » et « Le Guide du mauvais père ») —, vous allez pouvoir en savoir plus sur ce personnage, injustement oublié par l’histoire, qui fut le premier homme à dompter le mouvement et à projeter un film. À travers cette chronique d’une passion obsessionnelle, Guy Delisle va, avec beaucoup d’humour et avec son caricatural trait stylisé, reconnaissable au premier coup d’œil, vous expliquer comment un type complexe, au sale caractère, voire misanthrope dans l’âme, va réussir à d’arrêter le temps.
Lire la suite...Claire Bretécher : la bande dessinée perd une icône…
Dire que nous sommes tristes est un mot bien faible pour saluer celle qui nous a quittés lundi (à Paris), à l’âge de 79 ans. Celle qui depuis un demi-siècle incarne la bande dessinée au féminin. Plus encore que la bande dessinée classique, la nouvelle BD adulte de l’après-mai 1968 était essentiellement une affaire d’hommes. Jusqu’à ce que, sans bruit, avec un crayon ravageur pour seule arme, Claire Bretécher s’y fasse rapidement respecter.
Née le 7 avril 1940 à Nantes, la jeune Claire est élevée chez les Ursulines de Jésus.
Après voir obtenu un professorat de dessin, elle devient enseignante le temps d’une seule année scolaire.
Elle rêve de bande dessinée et compte bien s’y faire rapidement une place.
Dès 1964, les journaux de la Maison de la Bonne Presse (aujourd’hui Bayard-Presse) lui ouvrent leurs portes de Club-Inter à Record, en passant par Le Pèlerin et Rallye jeunesse.
Elle illustre des articles, publie quelques courtes bandes dessinées et, surtout, crée en 1968, dans Record, « Baratine et Molgaga ».Elle effectue un court passage à Tintinen 1965 et 1966, égayant de ses dessins des articles sérieux et livrant quelques gags de « Hector ».
Pour son hebdomadaire favori, Spirou, elle imagine « Les Gnangnan » de 1968 à 1970 et dessine « Les Naufragés », avec la complicité de Raoul Cauvin au scénario. Sans oublier « Robin des Foies », qui parut brièvement en 1969.
Cette même année, elle fait son entrée au journal Pilote, accueillie à bras ouvert par René Goscinny dont elle avait illustré « Le Facteur Rhésus » dans L’Os à moelle en 1963 et 1964.
Dans Pilote, elle crée notamment « Cellulite », dans le n° 503 du 19 juin 1969, et participe aux fameuses pages d’actualité : seule femme au sein d’une équipe masculine.
C’est là que la légende est née.En 1970, elle dessine un épisode de «Tulipe et Minibus » sur un scénario d’Hubuc et, l’année suivante, commencent « Salade de saison » : gags en une planche présents dans l’hebdomadaire jusqu’en 1973.
Ses potes Nikita Mandryka et Gotlib, qui rêvent d’une bande dessinée plus adulte, parviennent à l’entraîner, en 1972, dans la folle aventure de L’Écho des savanes.
Présente dans les six premiers numéros, elle quitte le navire l’année suivante pour rejoindre Le Nouvel Observateur où, à la demande de Jean Daniel, elle publie une première planche sans titre dans le n° 463 du 24 septembre 1973.
Devenue « La Page des frustrés », puis « Les Frustrés », cette rubrique connaît un succès considérable.
Elle sera suivie par « Le Cordon infernal », « La Vie passionnée de Thérèse d’Avila », « Les Mères », « Le Destin de Monique », « Docteur Ventouse bobologue », « Tourista », « Mouler démouler » et enfin « Agrippine » : adolescente moderne créée en 1988.
Citons aussi un travail parallèle peu connu : la série « Fernand l’orphelin », publiée en 1977 dans Le Trombone illustré (le supplément clandestin à Spirou), sur des scénarios d’Yvan Delporte, qui n’était autre que la traduction d’« Alfred de Wees » qui parut, à l’origine, dans le journal hollandais Pep, de 1971 à 1972.
En 1975, elle édite elle-même ses albums, jusqu’en 2006 où elle revient, avec son catalogue, aux éditions Dargaud.
Peintre de talent, elle a été exposée à plusieurs reprises. Des reproductions sont publiées dans « Portraits » chez Denoel en 1983, « Moments de lassitude » en 1999, sous son propre label, et « Portraits sentimentaux » aux éditions de la Martinière en 2004.
Son dernier album, un recueil de ses dessins de presse intitulé « Petits Travers », a été proposé par Dargaud en 2018.
Si son humour était sans concession, Claire Bretécher était une personne d’apparence timide, mais qui ne se laissait pas faire. Son trait nerveux et caricatural, ses propos vifs proches de la vie au quotidien, ont marqué plusieurs générations de lecteurs.
Elle avait réussi à conquérir un large lectorat, pas nécessairement acquis à la BD, grâce à sa longue collaboration au Nouvel Observateur.
Cependant, lui décerner le titre de première dessinatrice de bande dessinée que lui attribuent volontiers les médias n’est pas juste.
Certes, elle est la première femme a avoir pratiqué ce métier d’égal à égal avec les hommes — et plus particulièrement avec ceux de la génération post 1968 —, mais bien avant elle, les Rose Maury, Davine, Manon Iessel, Solveg, Martine Berthélémy, Marie Mad, Janine Lay et bien d’autres femmes l’ont exercé.
Le meilleur hommage à lui rendre est de se plonger dans la lecture de ses albums qui n’ont pas pris une ride, et dont la plupart ont été réédités par Dargaud.
À ses proches, BDzoom.com présente ses condoléances et manifeste sa profonde tristesse.
Henri FILIPPINI
avec un tout petit peu de Gilles RATIER
Merci beaucoup pour cet hommage !
Merci pour ce panorama de l’oeuvre de Claire Bretécher, quel parcours !
Comme beaucoup d’amateurs de l’époque j’étais amoureux de cette belle dessinatrice qui nous offrait en Cellulite la hideur incarn : quel contraste ! J’ai envié Gébé dans le photo roman le montrant embrasser Claire.
Pierre Pascal ne tarissait pas d’éloges sur sa technique, ayant eu la chance de la voir à l’oeuvre, retra
(suite)…retravaillant sans cesse son trait jusqu’à cette perfection expressive qui le caractérisait.
Je me souviens qu’elle avait plaisamment déclaré , en constatant le succès du jeune Jacques Glénat, que » cela lui retournait les sangs « !! Et qu’elle aussi se lancerait dans l’auto-édition.
Ce qu’elle a fait pendant trente ans, chapeau !
La chance veut que je possède un dessin la représentant à son bureau, c’est une artiste que j’aimais beaucoup.
Condoléances attristées pour ses proches.
Elle restera dans l’histoire du neuvième art comme une créatrice majeure.
Cela m’a fait un choc…Ma mère adorait Claire Brétécher, je connait son oeuvre depuis mes 6 ans…Un vrai symbole et une femme très belle au grand talent
Une auteure ou autrice importante. Beaucoup d’humour caustique, notamment les Frustrès, ces bobos lecteurs du Nouvel Obs qu’elle adorait mettre en boite, avec leurs contradictions (du style « je suis révolté contre l’injustice et la misère, mais je reste avachi sur mon canapé ».