Quel plaisir, après des années et des années de chroniques sur les nouvelles parutions concernant le 9e art, de continuer à découvrir des auteurs prometteurs qui, d’emblée, semblent vraiment maîtriser les codes narratifs et graphiques de la bande dessinée ! C’est d’autant plus méritoire quand il s’agit d’un premier album en ce domaine : ce qui est le cas de Pierre Alexandrine avec son « Amourante ». Ce dense ouvrage de 230 pages, édité chez Glénat, nous propose un voyage aussi palpitant qu’amusant à travers les époques et les lieux, en remettant en question notre obsession tout à fait compréhensible de plaire perpétuellement et de ne pas mourir…
Lire la suite...Ces familles séparées par la guerre…

La partition entre Corée du Nord et Corée du Sud, en 1953, à la fin de la guerre, a provoqué, en séparant arbitrairement des familles, des drames incroyables. Ces familles ainsi dynamitées et traumatisées ne peuvent se reconstruire qu’en se retrouvant, mais les retrouvailles sont rares. Aujourd’hui encore, des milliers de Coréens recherchent leurs proches disparus et c’est ce que raconte Keum Suk Gendry-Kim à travers l’histoire de sa propre famille…
À Séoul, alors qu’elle a décidé de déménager, se séparant ainsi de sa mère, non sans hésitation et culpabilité, Keum Suk Gendry-Kim se pose des questions et finit par remonter le temps jusqu’à ces séparations autrement plus définitives : celles occasionnées par la guerre. Tout commence avec les bombardements et ces populations qui fuient leur terre natale, ces couples apeurés qui finissent dans la cohue par se défaire et se perdre de vue.
C’est ce qui est arrivé à la mère de la dessinatrice. La vieille dame de 92 ans raconte alors à sa fille cet épisode abominable où elle perd son mari et un de ses enfants qu’elle ne reverra plus jamais. La narratrice évoque cette attente interminable où toute sa vie sa mère a espéré un signe, un appel, une information. Mais, rien ! Il faut refaire sa vie, tout reconstruire avec l’enfant qui lui reste de cette première union et les fantômes de la vie antérieure, notamment sa sœur jamais revue non plus.
Keum Suk Gendry-Kim sait qu’il est urgent de raconter ce passé terrifiant : la génération qui a connu la guerre disparait et les jeunes en ignorent tout, ou presque. C’est maintenant ou jamais ! L’autrice raconte ainsi minutieusement ces vies définitivement entachées, meurtries, d’abord par la guerre avec les Japonais qui occupaient la Corée jusqu’en 1945, puis par la guerre entre États-Unis et Union soviétique.
D’un trait simple ou d’un coup de pinceau efficace, ce récit créé évidemment le malaise, tant l’abomination de telles situations est inacceptable, en Corée ou ailleurs. Keum Suk Gendry-Kim évoque en postface les circonstances de cet album, précisant qu’elle a réalisé une fiction à partir de plusieurs témoignages bien réels plutôt qu’une biographie.
Didier QUELLA-GUYOT ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
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« L’Attente » par Keum Suk Gendry-Kim
Éditions Futuropolis (26 €) – EAN : 97827548304192