« Yoko Tsuno » : l’ultime aventure ?

À l’âge vénérable de 90 ans, Roger Leloup signe une nouvelle aventure de Yoko Tsuno. Objet de polémiques, l’album a le mérite de permettre aux amoureux de la jolie Japonaise de suivre une nouvelle histoire.

Non loin de l’abbaye en ruine de Loch Castle en Écosse, Bonnie et Emilia surprennent deux moines se livrant à d’étranges activités. Le frère Maxime confie à Yoko qu’au XIIIe siècle un aigle royal diabolique hantait l’abbaye. L’animal aurait été enlevé par une espèce d’œuf se déplaçant dans une spirale de lumière. Grâce à son amie Monya —venue du futur —, Yoko peut utiliser sa machine à voyager dans le temps, afin de se rendre au Moyen Âge et découvrir la vérité sur cet oiseau. De fabrication synthétique, il s’avère avoir été mis au point par les Vinéens, afin de surveiller les moines alchimistes de l’abbaye. Un voyage intemporel conduit notre héroïne jusqu’au temple des immortels dont le labyrinthe cache l’élu suprême, lequel impose sa loi aux Vinéens… 

Ce récit est une aventure aux multiples rebondissements, qui se termine sur un point d’interrogation. « Mais c’est une autre histoire », confie en dernière page de l’album Roger Leloup, à travers la voix de Yoko. À 90 ans, son créateur semble ne pas vouloir poser ses pinceaux, peut-être pour ne pas condamner à mort son héroïne : puisqu’il a — à plusieurs reprises — annoncé qu’elle disparaîtrait avec lui… 

La lecture de l’ouvrage sera plus aisée pour les lecteurs qui connaissent bien la série, l’auteur multipliant le retour de personnages nés au cours des épisodes précédents et dont les rôles ne sont pas toujours précisés. Un plaisir — donc ! — pour les lecteurs fidèles au riche univers construit page après page par Roger Leloup, depuis bientôt 55 ans. Science-fiction, aventure policière et ésotérisme se mêlent au fil d’une riche intrigue, parfois un peu confuse. 

On peut regretter les silhouettes des personnages disproportionnées, les visages déformés, un lettrage malhabile, mais ce sont des caractéristiques rencontrées chez la plupart des dessinateurs âgés. En revanche, les décors, les monuments et les engins sont toujours aussi soignés. Certes, ce n’est pas le titre le plus réussi des 31 albums publiés depuis 1970, mais ne boudons pas notre plaisir : un nouveau Yoko Tsuno est toujours le bienvenu. Merci, monsieur Roger Leloup, de continuer à consacrer tout votre temps à Yoko et à ses nombreux compagnons, tout aussi attachants.

Né le 17 janvier 1933 à Verviers en Belgique, Roger Leloup est le fils d’un coiffeur qui compte parmi ses clients un certain Jacques Martin. Devenu son mentor, le dessinateur d’Alix lui confie en 1950 la mise en couleurs des aventures du blond Gaulois. Trois ans plus tard, suivant Jacques Martin, Roger Leloup entre aux Studios Hergé où il travaille jusqu’en 1969. Son morceau de bravoure : le dessin du jet du milliardaire Carreidas dans « Vol 714 pour Sydney ». Il réalise des fiches techniques dans l’hebdomadaire Tintin dès le milieu des années 1950. C’est en 1968 qu’il crée Yoko Tsuno — avec la complicité de Maurice Tillieux au scénario —, dont les premières pages sont publiées dans Spirou en septembre 1970. Très attaché au personnage, qu’il anime rapidement seul, il devient son double, au point de poursuivre ses aventures à un âge où la plupart de ses confrères ont depuis longtemps posé leur crayon. Son dessin méticuleux,d’une rare précision, est un bel exemple de ce que peut offrir le meilleur de la bande dessinée franco-belge. (1)

Henri FILIPPINI

(1)  Sur Roger Leloup, voir le « Coin du patrimoine » que lui a consacré Gilles Ratier sur BDzoom.com : Roger Leloup avant « Yoko Tsuno ».

« Yoko Tsuno T31 : L’Aigle des Highlands » par Roger Leloup

Éditions Dupuis (12,50 €) — ISBN : 978-2-8085-0494-2

« Yoko Tsuno T31 : L’Aigle des Highlands. Esquisse d’une œuvre » par Roger Leloup

Éditions Dupuis (39 €) — ISBN : 978-2-8085-0674-8, pour l’édition à tirage limité à 3 000 exemplaires, grand format (25,80 x 36,90), 80 pages, sous couverture inédite

Parution 17 mai 2024

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5 réponses à « Yoko Tsuno » : l’ultime aventure ?

  1. Matvienko Franck dit :

    Victor , pol mal dessinés. il faut arrêter.

  2. Caluwaerts Stephan dit :

    Cher Roger,
    Un immense merci de rester le poète créateur de cette si belle série.
    Vous avez donné la vie à Yoko et en retour, elle vous donne la force et l’envie de poursuivre votre fabuleux chemin d’artiste. C’est une belle leçon d’espoir !
    Dans l’attente impatiente d’un nouvel opus, je vous adresse mes plus sincères amitiés.
    Stephan Caluwaerts

    • Wurm Philippe dit :

      Tout à fait exact Monsieur Caluwaerts !
      Roger Leloup fait preuve d’une abnégation remarquable à son métier en produisant à son âge un nouvel album de la saga de son héroïne japonaise.
      Non seulement il a fait rêver des millions de lecteurs de Yoko Tsuno, et aussi d’Alix de Lefrancq et même de Tintin, mais il fait notre admiration professionnelle en trouvant la force de continuer à faire vivre son univers si didactique, charmant et poétique.
      Encore merci Monsieur Leloup.

  3. BOX OFFICE STORY dit :

    95% des jeunes dessinateurs amateurs de la palette graphique seraient bien incapables d’offrir de si magnifiques crayonnés à 90 ans…En plus il faut connaitre la géométrie, utiliser des règles etc… allez-y premier travail : un château vu du haut…Quand j’avais 6 ans, « L’orgue du diable » m’avait scotché par son graphisme incroyable et quelle histoire. J’avais l’album broché sorti en 1973 je crois que j’avais réduit en papier pelure tant je l’avais lu et relu….

  4. Gilou dit :

    je vais l’acheter ce week-end. effectivement l’orgue du diable (comme message pour l’eternite) est UN incontournable. Toujours heureux de Lire de nouvelles histoires. I faut y aller doucement a son age Mai’s avec une bonne hygiene de vie j’ai confiance pour le volume 32,

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