Marie-Mad : disparition, à 102 ans, de la doyenne des auteurs de BD !

La disparition de Marie-Mad, à l’âge de 102 ans, invite à se souvenir que, bien avant Claire Bretécher, d’autres femmes œuvraient dans l’ombre, au sein du monde de la bande dessinée : Manon Iessel, Janine Lay, Solveg, Janine Janvier… et Marie-Madeleine Bourdin alias Marie-Mad ! (1) Retraitée depuis plus de quarante ans, cette dernière était la créatrice d’un duo de bambins campagnards qui a fait rêver plusieurs générations de jeunes lecteurs : Titounet et Titounette.

« Titounet et Titounette » dans Perlin et Pinpin (en 1965).

Marie-Mad mise à l'honneur dans sa ville de Vernon, en Normandie, à l'occasion de son centenaire.

Fille d’un ingénieur mécanicien et d’une mère couturière, Marie-Madeleine Bourdin voit le jour à Paris, le 27 novembre 1922. Dès son plus jeune âge passé à la campagne en Normandie, puis à Neuilly-sur-Seine où elle est scolarisée dans une école laïque, elle apprécie les histoires pour enfants (« Bécassine », « Lili », « Zig et Puce »…), sans oublier les œuvres de Manon Iessel qu’elle apprécie particulièrement ou l’univers animalier de Benjamin Rabier.

Passionnée par le dessin, elle obtient le concours pour entrer à l’école Duperret en 1939, mais la guerre met un terme à son rêve : l’école s’étant réfugiée à Marseille. Elle travaille alors en usine, puis entre comme dactylo à l’Union des œuvres catholiques de France (UOCF) qui publie Cœurs vaillants et Âmes vaillantes.

Illustrations pour le n°10 de Coeurs vaillants (22/09/1946) où M.M. Bourdin met en scène un certain Tintin, alors vedette de ce catholique journal français !

Conscient de ses talents de dessinatrice, l’abbé Courtois (cofondateur de l’Union) lui permet d’entrer à l’atelier de dessin dirigé par Frédéric-Antonin Breysse : le créateur d’« Oscar Hamel ». Elle réalise des illustrations, des jeux, des bricolages et quelques courtes bandes dessinées — signée alors sous son nom de famille : Bourdin — pour ces deux journaux de ce qui allait devenir les éditions Fleurus, puis pour le magazine Fripounet et Marisette édité par le même organe. Parallèlement, Marie-Mad illustre des films fixes, notamment pour les éditions du Berger.

« Une lumière dans la tour » : version colorisée publiée en album aux éditions du Triomphe (2017).

Sa première bande dessinée (« Une lumière dans la tour ») est publiée en 1950 dans un style semi-réaliste — en dehors de quelques courtes bandes pédagogiques, ça sera sa seule BD d’aventure (2) — par Âmes vaillantes, mais c’est dans Cœurs vaillant que « Titounet » voit le jour, en 1955.

Un an plus tard, rejoint par sa sœur Titounette, il devient, l’un des héros emblématiques de Perlin et Pinpin : journal repris le 21 octobre 1956, après une dizaine d’années d’absence, et qui porte le nom des deux lutins de Maurice Cuvilier (les autres vedettes de l’hebdomadaire, dont les aventures paraissaient jusque-là dans Âmes vaillantes). 

Marie-Mad animera les aventures des deux enfants entourés d’animaux et évoluant dans un décor champêtre, jusqu’à son départ à la retraite en 1982 : — soit durant plus 25 ans.

À raison de deux pages hebdomadaires et de nombreuses couvertures, elle aura dessiné plus de 3 000 pages de cette série inusable.

« Titounet et Titounette » dans Perlin et Pinpin (en 1956).

Une collection de 47 albums est publiée par Fleurus, entre 1958 et 1968.

Depuis 1994, les éditions du Triomphe rééditent, dans une version inédite (à partir des originaux conservés par l’autrice), les aventures de Titounet et Titounette.

On doit aussi à Marie-Mad l’illustration de trois romans de la collection Monique et des Almanachs Fleurus  de 1948 à 1966.

Elle a également travaillé pour les almanachs du Croisé (mensuel catholique pour les enfants, édité à Toulouse) à partir de 1952, ainsi que pour l’hebdomadaire Bernadette de la Maison de la Bonne Presse, où elle a animé huit épisodes de la série « Nicou, Niquette et le lutin Plic », entre 1956 et 1962.

« Nicou, Niquette et le lutin Plic » dans Bernadette n° 69 (05/08/1962).

Une fois retraitée, elle s’est consacrée à la peinture et à la sculpture, exposant régulièrement ses œuvres. Résidant à Vernon dans l’Eure depuis le début des années 1960, elle s’est éteinte le 11 août dernier à l’hôpital de cette ville normande. BDzoom.com présente ses plus sincères condoléances à ses neuf nièces et neveux.

Enfin, notons que, de ce triste fait, le doyen du 9e art franco-belge devient Dino Attanasio. (3)

Henri FILIPPINI

Relecture, corrections, rajouts, compléments d’information et mise en pages : Gilles RATIER

(1)  Voir sur BDzoom.com : Les femmes dans la bande dessinée européenne francophone….

(2)  « Une lumière dans la tour » est réédité à partir du n° 143 (daté du troisième trimestre 2014) de la revue Hop !, lequel propose un entretien avec Marie-Mad, ainsi que sa bibliographie complète, puis dans un album colorisé aux éditions du Triomphe en 2017 ; voir sur BDzoom.com : Du Triomphe… Encore !

(3)  Voir sur BDzoom.com : Un ouvrage très complet sur l’un des doyens des dessinateurs belges de BD : Dino Attanasio !.

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