La poétesse américaine Emily Dickinson (1830-1886) est manifestement intrigante. Elle n’a été reconnue comme écrivaine qu’après sa mort, sa sœur découvrant alors 1 775 poèmes qu’elle avait écrits. Cette femme de bonne famille, solitaire, indépendante, insoumise et passionnée par les mots l’était aussi par les plantes et le monde sensible qui l’entourait, comme le montre joliment « Le Jardin d’Emily » de Lydia Corry.
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Notre sélection de la semaine : “ Malefosse T.1 : L’escorte ” par François Dermaut et Xavier Gelot, “ RG T.1 : Ryad-sur-Seine ” par Frederik Peeters et Pierre Dragon et “ Messire Guillaume T.2 : Le pays de vérité ” par Matthieu Bonhomme et Gwen de Bonneval.
“ Malefosse T.1 : L’escorte ” par François Dermaut et Xavier Gelot
Editions Glénat (9,40 Euros)
25 ans plus tôt, François Dermaut, en compagnie du scénariste (alors débutant) Daniel Bardet, lançait «Les chemins de Malefosse», série historique se déroulant pendant les guerres de Religions, dans les pages du mensuel Circus. Cette épopée, très bien documentée, mêlant un langage savoureux (souvent empreint de paillardises) à un dessin minutieux (avec des décors soignés et des personnages aux trognes truculentes), se poursuivit le temps de douze albums, avant que François Dermaut cède la partie graphique à Brice Goepfert, en 2004. Après s’être mis d’accord avec son précédent compagnon de route, Dermaut a décidé de reprendre les deux héros mercenaires allemands (Gunther et Fritz), pour raconter la genèse des «Chemins», 20 ans plus tôt, à Nuremberg. Changement de technique (en fait, c’est un retour à la couleur directe, procédé qu’il utilisait autrefois, quand il travaillait chez Fleurus, et, aujourd’hui, le résultat est somptueux) et adjonction d’un co-scénariste (encore un nouveau venu talentueux qui a très bien assimilé la narration particulière de la BD) pour un premier album remarquable !
“ RG T.1 : Ryad-sur-Seine ” par Frederik Peeters et Pierre Dragon
Editions Gallimard (15 Euros)
Ancien gardien de la paix reconverti dans les renseignements généraux, Pierre Dragon, s’est inspiré de son activité d’agent sur le terrain pour se confier à l’éclectique dessinateur Suisse Frederik Peeters, lequel l’a mis en scène dans une bande dessinée finement illustrée. Son graphisme renouvelé, peut-être moins épuré que sur ces précédentes œuvres (comme le remarquable «Pilules bleues» et les très recommandables «Lupus» ou «Koma»), lui a permis de nous concocter un polar très réaliste, dans la lignée de ceux écrits par Raymond Chandler ou James Ellroy ; prouvant ainsi son aisance à changer de sujet, après être passé de l’autobiographie à la science-fiction et au fantastique onirique… Placé à la tête d’une petite équipe composée de deux collègues choisis par ses soins, le fonceur Pierre Dragon mène des recherches sur le financement du terrorisme. Il surveille un groupe de trafiquants qui est peut-être lié à des réseaux islamistes. Entre planques et filatures, coups tordus et pressions politiques, l’enquête est menée avec brio, ne manque ni d’humour (le passage avec les agents du F.B.I. qui débarquent à Paris est un véritable régal !) ni de suspense, et n’oublie pas de laisser une place non négligeable à la vie intime difficile de ce viril superflic et aux galères professionnelles quotidiennes. En attendant un deuxième tome, que l’auteur nous promet moins «glamour», la crédibilité et l’efficacité de ce récit, particulièrement bien maîtrisé, fait honneur à la collection «Bayou» dirigée par Joann Sfar !
“ Messire Guillaume T.2 : Le pays de vérité ” par Matthieu Bonhomme et Gwen de Bonneval
Editions Dupuis (9,80 Euros)
Guillaume est le jeune petit-fils du comte de Sainhac, et pourrait prétendre à sa succession. Après le mystérieux décès de son père, il va partir, seul, à la recherche de sa sœur, disparue au cœur d’une région où même les hommes de Messire Brifaut, son arrogant beau-père, n’osent s’aventurer. Au fil de son périple, il va croiser la route d’un curieux chevalier errant, puis va se retrouver dans un monde parallèle, confronté, tour à tour à des géants hommes-troncs qui s’avèrent finalement sympathiques, à de traîtresses créatures aquatiques, à de féroces hommes-chiens et à un despote magnanime. Au sein de ce surprenant Moyen-âge (surtout dans ce deuxième volet), cette quête initiatique, fort bien narrée, dialoguée et mise en scène, se révèle passionnante : l’univers légendaire sorti de l’imagination débordante de Gwen de Bonneval étant totalement cohérent, et le dessin élégant du prolifique Matthieu Bonhomme (ne manquez pas non plus son superbe «Marquis d’Anaon» scénarisé par Fabien Vehlmann) se prêtant parfaitement à cet univers fantastique parfaitement maîtrisé !
Gilles RATIER