La poétesse américaine Emily Dickinson (1830-1886) est manifestement intrigante. Elle n’a été reconnue comme écrivaine qu’après sa mort, sa sœur découvrant alors 1 775 poèmes qu’elle avait écrits. Cette femme de bonne famille, solitaire, indépendante, insoumise et passionnée par les mots l’était aussi par les plantes et le monde sensible qui l’entourait, comme le montre joliment « Le Jardin d’Emily » de Lydia Corry.
Lire la suite...« Un peu de bois et d’acier » par Christophe Chabouté
Après ses précédentes expérimentations graphiques et narratives qu’étaient « Construire un feu » et « Tout seul », Christophe Chabouté nous revient avec un pavé de trois cent vingt-huit pages complètement muettes, où il prouve, une fois de plus, son exceptionnelle maîtrise du noir et blanc et sa faconde à raconter une histoire sans utiliser les procédés habituellement utilisés pour nourrir une intrigue !
Il porte, cette fois-ci, son regard particulier sur un simple banc public où vient se frotter le derrière de tant d’anonymes… Il fait, alors, de ce témoin privilégié de l’activité (ou de l’inactivité) humaine, le véritable héros d’un récit où l’on retrouve un peu de la magie, de la rêverie et de la poésie que l’on a pu ressentir, au cinéma, avec les tribulations d’un Jacques Tati, d’un Charlie Chaplin ou d’un Buster Keaton … : ce banc futile en devient alors même attachant, puisqu’il nous rappelle à quel point l’inutile et le quotidien peuvent être beaux, si on y prête vraiment attention !
C’est ainsi que l’on va voir défiler, à travers les jours et les saisons, tous sortes de gens qui s’y arrêtent furtivement ou plus longtemps et qui, même, y reviennent régulièrement : que ce soient des enfants, un couple de retraités, un cadre pressé, un skateur en liberté, un clochard aux prises avec un policier ou « des amoureux qui s’bécotent…, en s’foutant pas mal du regard oblique des passants z’honnêtes… ».
Quoi qu’il en soit, la nature humaine y apparaît toujours de manière positive et c’est d’ailleurs, certainement, ce qui contribue à la réussite de cette bande dessinée contemplative où l’auteur aiguise quand même son trait déjà acéré, vif et nerveux.
D’autant plus que cet exercice de style drôle et singulier flirte, par moments, avec la satire sociale, puisqu’il met en exergue certains travers de notre société, tout en déroulant ces différentes bribes d’existence, sans sensiblerie mais avec humour et émotion.
Gilles RATIER
« Un peu de bois et d’acier » par Christophe Chabouté
Éditions Vents d’Ouest (30 €) – ISBN : 978-2-7493-0655-1