« Les Aventures de Gérard Crétin » est une bande dessinée en une page proposée dans le mensuel Mikado des éditions jeunesse Milan, entre 1989 et 1994, et c’est la première série de gags que l’immense Florence Cestac (1) a créée spécifiquement pour la presse ! Son antihéros a tendance à être vantard et gaffeur : il croit souvent savoir tout faire mieux que les autres et être le meilleur en tout… Mais il est quand même attachant, car terriblement naïf ! Ainsi, il enchaîne les situations hilarantes et embarrassantes, incarnant, avec une tendre absurdité, certains travers humains. Le trait de la reine du gros nez en BD y est déjà unique, même si elle juge avoir fait quelques progrès depuis. Mais comme le dit elle-même : « un petit coup de nostalgie, ça ne peut pas faire de mal ! »
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Dans sa préface à cette adaptation (en attendant celle prévue pour le cinéma par Albert Dupontel) de ce livre de Pierre Lemaître qui a reçu de nombreux prix littéraires — dont le Goncourt en 2013 —, l’acteur Philippe Torreton a écrit : « Ce n’est pas une BD, c’est un scanner ! » Cela résume bien ce qu’ont pu ressentir, après avoir refermé cette bande dessinée, ceux qui ont lu avant ce roman remarquable par sa puissance d’évocation. Malgré l’appréhension qu’ils ont tous eue de voir tirer un trait sur leur imaginaire ou de « réduire à quelques bulles l’immensité de ces 567 pages d’écriture », le résultat final est étonnant : à la hauteur de la réputation du dessinateur !
Sur les ruines de la Première Guerre mondiale, deux rescapés des tranchées, passablement abîmés, prennent leur revanche sur une société qui n’aspire qu’à oublier l’horreur du carnage passé. Ces héros laissés pour compte, trop vite oubliés, vont décider de réaliser une escroquerie aussi spectaculaire qu’amorale : la commercialisation au rabais de monuments aux morts, sans avoir la moindre intention de les construire et donc, encore moins, de les livrer dans toutes les communes du pays ! Mais des sentiers de la gloire à la subversion de la patrie victorieuse, ils vont bientôt découvrir que la France ne plaisante pas avec ses morts…
Après avoir déjà évoqué la Grande Guerre dans « Le Sang des Valentines » (avec Catel, chez Casterman), celui qui a su déjà adapter avec talent des romans comme « Shutter Island », « Scarface » ou « Piège nuptial », s’est attaqué, en compagnie de l’auteur des textes d’origine, à cette fresque d’une rare cruauté. En ne reprenant que quelques extraits du roman et grâce à l’utilisation habile d’un univers graphique naviguant entre réalisme et onirisme, Christian de Metter a su sublimer ce grand roman sur l’illusion de l’armistice, sur l’abomination érigée en vertu, sur les lendemains qui déchantent et sur la tragédie d’une génération perdue.
Gilles RATIER
« Au revoir là-haut » par Christian de Metter et Pierre Lemaître