Prix du meilleur album au festival Quai des bulles de Saint-Malo, cette monumentale fresque d’apprentissage en 280 pages en noir et blanc, où seules les mélodies apportent de la couleur, mérite vraiment votre attention ! C’est une quête initiatique, mise en scène par Édouard Cour (aux dessins) et Jean-Christophe Deveney (au scénario), qui nous plonge dans le Saint-Empire romain germanique du début du XVIIIe siècle. En suivant l’ascension, à la fois magnifique et tragique, de deux talentueux jumeaux orphelins — sur qui plane l’ombre d’un mystérieux compositeur allemand qui signe ses partitions des trois mots « Soli Deo Gloria » —, elle nous entraîne vers une méditation métaphysique sur le sens de la création, nous rappelant le pouvoir qu’a la musique sur les humains !
Lire la suite...« L’Herbe folle » par Jean-François et Maryse Charles
Si Jean-François Charles, qui était alors étudiant aux cheveux longs à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, et Maryse, sa compagne encore lycéenne en mini-jupe, avaient bien, dans leur jeunesse, des allures baba cool, ils n’étaient pas vraiment des hippies ; d’ailleurs, contrairement à leurs héros, Gilles et Theda, ils n’ont pas tout quitté pour élever des chèvres et faire du fromage en Auvergne, en pleine nature, loin des facilités du tourisme. Pourtant, avec ce touchant petit roman graphique, inspiré de leur propre vécu, ils réussissent, avec douceur et nostalgie, à nous faire revivre l’insouciance du début des années soixante-dix, les rêves de paix et de liberté des jeunes d’alors et leurs désirs de vivre, ensemble, dans un monde plus juste, loin de tout.
Cette chronique sensible, empreinte de justesse, commence de nos jours, à Paris. Un professeur de dessin aux Beaux-Arts, approchant la soixantaine, a rendez-vous au Train bleu, le célèbre café aux décors rococo de la gare de Lyon, avec la fille d’amis de longue date. Cette dernière veut en savoir plus sur ses parents qu’elle n’a jamais connus.
C’est ainsi que le petit prof va se remémorer nombre de souvenirs de jeunesse de ses cours aux Beaux-Arts avec, surtout, l’irruption de Théda : une jeune étudiante dans le vent, peu sage, mordant la vie à pleines dents. Cette sorte d’herbe folle, symbole d’une liberté sans limites, ensoleille la vie de ses congénères d’alors, tous subjugués par sa beauté et son esprit libertaire. 
Ayant finalement jeté son dévolu sur le beau Gilles, cette croqueuse d’hommes part avec lui, et quelques autres, vivre et élever des chèvres en Auvergne, aux pieds des volcans : là où, d’ailleurs, les Charles ont un joli pied-à-terre. C’était l’époque insouciante du flower power, du peace & love, de l’amour libre et du mouvement hippie…
Avec son dessin, lui aussi libéré, ornant des planches réalisées en délicates couleurs directes, Jean-François Charles met particulièrement bien en valeur le sujet de la différence qui est principalement traité par son épouse dans cet ouvrage, en attendant de combler ses fidèles aficionados avec le dernier tome de la deuxième saison de leur « India Dreams »…
Gilles RATIER
« L’Herbe folle » par Jean-François et Maryse Charles
Éditions Glénat (22 €) – ISBN : 978-2-344-00827-0











