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« Les Voyages d’Ulysse » par Emmanuel Lepage, René Follet et Sophie Michel

10/10/2016
Par Gilles Ratier

Remettant en scène l’un des protagonistes de son superbe « Les Voyages d’Anna », carnet de voyage mêlant une chronique épistolaire et les croquis du peintre imaginaire Jules Toulet (publié chez le même éditeur en 2005), Emmanuel Lepage et sa femme Sophie Michel livrent ici une grandiose odyssée maritime et féminine. Cerise sur le gâteau : l’ami et maître en dessin de Lepage, l’immense René Follet, signe certaines illustrations parsemées dans ce récit de voyage, d’aventures et de rédemption, d’un Ulysse moderne.

À la fin du XIX^e siècle, Jules a perdu sa muse et traîne son spleen en Méditerranée. À Istanbul, le cœur dévasté et les poches vides, il rencontre une jeune femme nommée Salomé qui s’intéresse à la peinture, et qui est également en quête d’elle-même. Cette belle et ombrageuse capitaine de l’Odysseus veut rentrer chez elle, mais elle compte aussi sur l’artiste pour l’aider à retrouver le peintre Ammôn Kasacz dont les toiles d’inspiration antiques l’obsèdent : un certain nombre d’obstacles va, alors, les faire naviguer sur les pas d’Ulysse.

Ce sont ces peintures qui, dans l’album, sont dues à René Follet ; la plupart ayant été réalisées, autrefois, pour un album didactique édité par Dupuis en 1971 : « Les Grecs ». Quant à Emmanuel Lepage, il nous offre, lui aussi, de véritables tableaux à chaque vignette de cette belle invitation à voyager à notre tour, ceci après nous avoir conté ses propres aventures maritimes ou humanitaires dans « Voyage aux Îles de la désolation », « Un printemps à Tchernobyl » ou « La Lune est blanche ».

Par sa qualité graphique (sur le plan technique, Vincent Odin des éditions Maghen a également fait un remarquable travail de conception), « Les Voyages d’Ulysse » est un ouvrage d’une élégance rare : l’hommage aux textes fondateurs grecs et à la virtuosité des dessinateurs classiques donne, finalement, une ambiance particulière assez singulière, mise en exergue par un scénario très poétique et romantique, qui prend son temps. Et c’est ce temps (ainsi que l’ampleur de cette bande dessinée qui comporte quand même deux cent vingt pages) qui apporte une souplesse si particulière au graphisme et à la narration…