Par les temps qui courent, il est rare qu’un éditeur se lance dans une saga aux allures classiques prévue en plusieurs volumes. Pourtant, Futuropolis a déjà financé les scénarii des six ouvrages nécessaires à l’épopée de « L’Ange corse », lesquels sont d’ores et déjà écrits, et les trois premiers opus sortiront en l’espace d’une seule année… Rien que pour cela — mais pas que… —, saluons la parution du premier tome de « L’Ange corse » : l’histoire d’un orphelin corse qui doit s’expatrier dans l’Indochine des années 1930, pour échapper à une vendetta. Le jeune insulaire est recueilli, à Saigon, par un riche commerçant et propriétaire terrien natif d’Ajaccio : mais sous sa façade respectable, cet homme, bien installé, trempe dans le proxénétisme et le trafic de stupéfiants…
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Best-seller de ce début d’été, « Seuls » se poursuit pour un deuxième cycle encore plus interrogatif, malgré les révélations du 5ème volume. Depuis la fin du précédent tome, qui clôturait le premier cycle, on sait en effet, maintenant, pourquoi les enfants sont seuls : ils sont morts ! Mais le suspense, lui, reste bien vivant !
« Nous avions besoin de faire cette révélation, nous explique Fabien Vehlmann, même si la réaction des lecteurs nous inquiétaient un peu. » Il est vrai qu’ils sont attachants ces gamins qui se retrouvent livrés à eux même dans une ville dépeuplée d’adultes, même s’ils n’ont pas tous le même sens de la sociabilité. Bruno Gazzotti confirme : « J’ai eu beaucoup de mal à dessiner la fin du premier cycle, tant il me faisait de la peine que ces enfants soient morts. Ca m’a donné un vrai coup de cafard », poursuit-il. « Mais les réactions les plus inattendues ne sont pas venues des enfants, mais de leurs parents », souligne Fabien Vehlman qui explique que les adultes trouvent la thématique et le traitement de la série trop difficilement supportables pour les enfants, là où ces derniers vivent très bien le récit et le plébiscitent.
De son coté, le dernier scénariste en date des aventures de « Spirou et Fantasio » a vécu différemment cette fin de cycle : « J’étais dans la suite, nous explique-t-il. C’est triste mais j’avais déjà fait le travail de deuil pour m’attacher à l’énergie restant à dégager car, paradoxalement, malgré leur situation, ces enfants incarnent la vie ». Et de développer : « Nous avions besoin de cette révélation pour aller plus loin dans le récit et poursuivre l’intrigue». Et avec force de crédibilité, le récit s’attache à toujours se situer à la frontière entre le fantastique et la réalité, à l’image cette fameuse quatrième dimension et demie, sorte d’espace-temps entre la vie et la mort et » qui pourrait être une théorie rationnelle acceptable pour les lecteurs « , précise le scénariste en ajoutant :« On a beaucoup comparé « Seuls » à la série TV « Lost ». Mais « Seuls » continue là où « Lost » s’arrête ».
Des influences et références, les deux auteurs n’en manquent évidemment pas, de « Sa majesté des mouches » à « Je suis une légende », en passant par « La Planète des singes » et même la sympathique bande dessinée de Roba « La Ribambelle ». Mais ils créent, avec cette connaissance, une œuvre totalement originale qu’ils élaborent en commun : « Nous discutons beaucoup et notre confiance réciproque nous permet d’explorer les idées de l’autre sans parti pris », disent-il en cœur. Ainsi, le fameux « enfant-mystère », tel que l’ont nommé les lecteurs, dont la présence fantomatique hante de manière – semble-t-il – aléatoire le récit, est-il une idée du dessinateur de « Soda ». Un Bruno Gazzotti qui, loin d’en être effrayé, prend énormément de plaisir avec le nombre de personnages à dessiner et la richesse urbaine de l’environnement. Il prend même du plaisir à truffer les décors de nombreux détails : « Quand j’étais gamin, nous dévoile-t-il en riant, j’avais un copain qui avait un casque. J’en étais terriblement jaloux. Alors, dans « Seuls », je mets des casques partout ! »
Au fil des albums, cette « Robinsonnade urbaine », comme la qualifie le scénariste de « Seuls » a donc trouvé son public, de plus en plus important, au point de se hisser en tête des meilleures ventes. L’attente des lecteurs se fait donc de plus en plus prononcée à chaque sortie d’album : « C’est la raison pour laquelle la série, souligne Fabien Vehlmann, initialement prévue en trois cycles de cinq volumes, devrait finalement connaitre des cycles plus courts », de quatre albums, et des sorties plus rapprochées entre épisodes « si ça ne se fait pas au détriment de la qualité », précisent les deux auteurs.
Laurent TURPIN
« Seuls » T6 (« La Quatrième dimension et demie ») par Bruno Gazzotti et Fabien Vehlmann
Éditions Dupuis (10,45 euros)
Le site officiel : http://www.seuls-labd.com