Avec la complicité habituelle de Doug Headline (le fils du célèbre écrivain), le Grand Prix d’Angoulême en 1990 s’est attaqué avec brio à une nouvelle mise en images d’un roman noir de la figure tutélaire du polar francophone : Jean-Patrick Manchette. Il s’agit, après « Morgue pleine » (déjà adapté en BD par les mêmes auteurs), de la seconde — et donc dernière ! — enquête du détective privé Eugène Tarpon. Elle est parue en 1976 dans la collection Super Noire des éditions Gallimard et elle fut tournée pour le cinéma sous le titre « Pour la peau d’un flic » par et avec Alain Delon, en 1981. Drôle et efficace, « Que d’os ! » imbrique de patibulaires personnages hors normes dans des situations plus qu’improbables.
Lire la suite...Le déserteur 1 : Nuit de chagrin, par Kris et Obion
Du déserteur, le lecteur entend parler dès les premières cases de l’album : ancien élément des troupes d’élites de l’armée citoyenne, celui qui se fait appeler Kyle Sanders se serait enfui et, après cinq ans de luttes clandestines, comme mercenaire, près de la frontière extérieure, il serait de retour dans la grande cité.
La nouvelle réjouit les manipulateurs et comploteurs en tout genres, hommes politiques ou truands, qui imaginent parfaitement le clandestin servant leurs intérêts comme bouc émissaire de leurs futures actions à la morale plus que douteuse.
Car l’essentiel du premier volume de cette nouvelle série, dans lequel le dénommé Kyle Sanders ne joue finalement qu’un rôle de témoin, se situe bien autour des compromissions diverses liées aux futures élections municipales. Il flotte une odeur insurrectionnelle – qui touche tous les niveaux de la population – tout au de cet album au cours duquel la pression populaire et politique monte progressivement. Les opinions se radicalisent de plus en plus, exacerbées par les guerres transfrontalières qui durent depuis des décennies.
Ce climat, Kris (le scénariste, auteur par ailleurs de Toussaint 66 chez le même éditeur) et Obion parviennent à nous le communiquer, par petites doses, grâce à leur sens aigu de la mise en scène , malgré un récit offrant une intrigue complexe (tant mieux direz-vous !)et la construction d’un univers (passage obligé en fantasy), très original tout en étant profondément réaliste.
Cette nouvelle série de politique-fiction mâtinée d’héroic-fantasy (ou l’inverse, selon la suite que les auteurs donneront à cette histoire), mérite plus qu’un coup d’œil, en espérant que les prochains volumes en confirment l’intérêt. LT






