Avec la complicité habituelle de Doug Headline (le fils du célèbre écrivain), le Grand Prix d’Angoulême en 1990 s’est attaqué avec brio à une nouvelle mise en images d’un roman noir de la figure tutélaire du polar francophone : Jean-Patrick Manchette. Il s’agit, après « Morgue pleine » (déjà adapté en BD par les mêmes auteurs), de la seconde — et donc dernière ! — enquête du détective privé Eugène Tarpon. Elle est parue en 1976 dans la collection Super Noire des éditions Gallimard et elle fut tournée pour le cinéma sous le titre « Pour la peau d’un flic » par et avec Alain Delon, en 1981. Drôle et efficace, « Que d’os ! » imbrique de patibulaires personnages hors normes dans des situations plus qu’improbables.
Lire la suite...Les Voyages de He Pao T.5
Vinh Khoa (le dessinateur d’origine vietnamienne qui signe du pseudonyme de Vink) et sa compagne Claudine (dite Cine) mettent ici un terme aux pérégrinations de la séduisante He Pao, commencées, en décembre 1983, avec « Le Moine fou », dans les pages du n°21 de la deuxième version de Charlie Mensuel, magazine alors orchestré par Nitika Mandryka.
Á noter que, dès les premiers opus de cette nouvelle mouture, le créateur du « Concombre masqué » était efficacement secondé par Philippe Mellot, lequel en deviendra, d’ailleurs, le véritable rédacteur en chef, dès août 1983.

Situées à l’origine en pleine Chine médiévale, les aventures de cette belle orpheline douée d’un talent unique dans les arts martiaux, en quête de son maître spirituel, ont toujours frappé ses lecteurs par son exceptionnelle beauté graphique ; ceci étant dû à une utilisation enchanteresse de la couleur directe et à une finesse, autant qu’une profondeur, du trait. Relevant plus de l’aventure philosophique que des films de combats asiatiques, cette véritable initiation au voyage intérieur et au rêve éveillé a su se forger un lectorat fidèle, tout au long des dix albums parus chez Dargaud sous l’appellation « Le Moine fou » (de 1984 à 1999) et des cinq autres rebaptisés « Les Voyages de He Pao », à partir de 2000.
Entre-temps, Vink (qui avait commencé sa carrière dans Tintin, en 1980, avec des récits complets regroupés sous le titre de « Contes et légendes du Vietnam » et avec un album historique et publicitaire pour l’évêché de Liège : « Pays de Liège, vie d’une église », scénarisé par Michel Dusart, en 1984) a expérimenté d’autres ambiances plus modernes avec « Une luciole dans la ville » (1989) ou « Le Passager » (en 2003 et 2004).
Nul doute qu’après ce superbe galop d’adieu à la belle guerrière guérisseuse, qui est aussi un retour aux sources (il s’agit en fait de quatre histoires initiatiques rythmées par de somptueuses aquarelles sur le thème du voyage), Vink et Cine sauront trouver de nouveaux terrains à défricher pour mettre à profit leurs années de pratiques d’une technique graphique reconnue comme époustouflante par tous les spécialistes ; d’autant plus que leurs scénarios, toujours aussi subtils qu’originaux car nourris de poésie et de spiritualité, sont un de leurs autres atouts narratifs !
Gilles RATIER
? Les Voyages de He Pao T.5 : Un matin pour tout horizon ? par Vink, avec la collaboration de Cine
Éditions Dargaud (13,50 Euros)







