Depuis presque 20 ans, l’idée d’une comédie de mœurs romantique sur fond de satire politique où une Première Dame aurait la possibilité d’influencer les affaires publiques de notre pays trottait dans la tête de Didier Tonchet : prolifique créateur de BD humoristiques bien connu (ahhh, « Raymond Calbuth » !) et scénariste toujours inspiré, comme c’est le cas ici (1)… Il nous embarque avec délices dans la jouissive histoire d’une actrice engagée de seconde zone qui va gagner le cœur des Français et d’un président de la République dont la cote de popularité est en chute libre, à un an des élections : le tout mis énergiquement en images, tout au long de 270 pages, par le dessin virevoltant de Jean-Philippe Peyraud (2)…
Lire la suite...Mourir au Paradis

Les événements dans les banlieues françaises nous montre à quel point la notion de concentration sociale peut être destructrice pour nos sociétés. Pierre Christin en convient, mais chez lui, contrepied malicieux de l’actualité, ce sont les ghettos pour riches qui sont sujets à réflexion.
Heaven’s Estate : le domaine du Paradis. Une de ces « gated city » américaines, des communautés fermées à destination des plus richissimes, gardées jour et nuit et où on ne rentre que parcimonieusement, sur invitation ou pour effectuer des services divers. Comme les livraisons, par exemple. Celles-ci sont le boulot des mexicains, qu’ici on appelle tous « Pancho » : c’est plus pratique ! Les familles vivent en vase clos, sans nouvelles « terrifiantes» de l’extérieur. Les enfants sont évidemment surprotégés mais laissés à l’abandon. Et ils s’ennuient ferme. Alors, désœuvré, sans référence sociale ni culturelle, ils dérapent. Et pas qu’un peu !
Alain Mounier, le dessinateur d’Exit et des Abîmes du temps, illustre avec sérieux et efficacité le réalisme sombre du récit (qu’on ne souhaite pas qualifier d’anticipation) d’un Pierre Christin en grande forme, qui a retrouvé (mais l’avait-il vraiment perdu ?) sa vison (trop) lucide de notre époque et sa verve revendicatrice politico-sociale des années Bilal.
Laurent Turpin
Dargaud – Long courrier – 13.5€