Le 3 décembre dernier à Strasbourg, le Conseil de l’Union européenne a approuvé le déclassement du loup dans l’échelle des espèces animales à protéger. Il est ainsi passé d’espèce « strictement protégée » à « protégée », ce qui a pour conséquence de faciliter son abattage. La raison invoquée pour cette modification est une mesure de protection du bétail face à une augmentation de la population lupine. Invité sur le plateau de Millevaches durant une année, le dessinateur Troubs s’est penché sur la question de la cohabitation entre le loup et l’homme… et rend compte de ce travail.
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Fats Waller T.1 : La voix de son maître , Swamp Thing l’intégrale T.1 : Génèse , La maison Winchester, Ayako T.3, Poèmes de Rimbaud en bandes dessinées.
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« Fats Waller T.1 : La voix de son maître » par Igort et Carlos Sampayo
Editions Casterman (13,50 Euros)
Voici une curieuse biographie du génial jazzman Fats Waller, compositeur insatiable, qui passa la plupart de sa vie à jouer sur son piano. Noir et obèse, il était méprisé par les femmes, mal compris par ses amis et il n’y avait pas plus malheureux que lui : pourtant, ses musiques s’exportent toujours dans le monde entier. Nous sommes en 1937 et nous assistons à l’effet produit par ses mélodies sur des gens totalement différents. L’argentin Carlos Sampayo (le scénariste d’«Alack Sinner») décrit plutôt une ambiance et une époque, sans trop s’attarder sur la densité du personnage. C’est plus un album d’ouverture, assez cérébral et au rythme très lent, qui diffuse l’émotion par petites touches. Le tout est mis en exergue par le graphisme élégant de l’italien Igort, lequel utilise, pour l’occasion, des tons camaïeu de rouges, gris et bruns du meilleur effet.
« Swamp Thing l’intégrale T.1 : Génèse » par Berni Wrightson et Len Wein
Editions Delcourt (19,95 Euros)
Excellente initiative des éditions Delcourt que cette superbe réédition respectant le noir et blanc d’origine ! Elle nous permet d’apprécier au mieux les qualités graphiques de l’américain Berni Wrightson, à une époque où il était encore fort habilement inspiré par les maîtres de l’horreur qu’étaient les artistes des EC Comics, Graham Ingels en tête. En France, nous avions déjà eu droit à des traductions plus ou moins tronquées dans les petits formats de chez Arédit/Artima mais aussi à une version fort honnête aux éditions du Fromage (L’Echo des Savanes, première formule), en deux volumes : elle ne proposait, hélas, que la genèse de l’œuvre. Genèse reprise ici intégralement, même avec la première histoire de 8 planches parue en 1971 dans House of secrets alors que la créature des marais n’était pas encore une série (elle le deviendra, un an plus tard, pour le compte de DC Comics). Berni Wrightson, souvent très critique sur son travail, considère encore cette BD comme l’une de ses meilleures réalisations : en effet, il y joue avec nos peurs et nos angoisses, équilibrant réalisme et caricature et osant quelques cadrages novateurs. Pour l’anecdote, sachez que «Swamp Thing» fut reprise par de nombreux auteurs dont Alan Moore, une version dont Guy Delcourt publia deux albums en France, sans succès… Espérons que cette indispensable intégrale ne connaîtra pas le même sort : ce ne serait vraiment pas mérité !
« La maison Winchester » par Max Cabanes et Marie-Charlotte Delmas
Editions Glénat (12 Euros)
Tiré d’une histoire vraie, ce «one shot» de la collection «Loge noire» est remarquablement illustrée par un Max Cabanes en grande forme. Signalons aussi la qualité des couleurs, qui apportent vraiment un plus à cette histoire basée sur la réputation de la Maison Winchester. Cette construction baroque dura 36 ans sous la direction de la femme du créateur du fusil du même nom. Adepte du spiritisme, elle avait prévu une chambre pour accueillir chaque âme des victimes de la célèbre carabine. Ces 160 pièces sont aujourd’hui visitées par un groupe de touristes… Possession et mauvais esprits sont donc au rendez-vous de ce récit qui ravira les amateurs mais qui pourra dérouter les esprits plus cartésiens. Le découpage cinématographique de Marie-Charlotte Delmas, une passionnée des croyances et superstitions populaires qui est également auteur de romans fantastiques pour adolescents, souffre encore un peu d’un manque de lisibilité : la narration est un peu trop poussive ; le premier scénario BD de cette scénariste toutefois prometteuse («Les miroirs du temps» avec Pierre Wininger, également dans la collection «Loge noire» de Glénat) avait déjà ce petit défaut. Cependant, nous ne pouvons que conseiller cet ouvrage qui sort quand même du lot des parutions de ce début d’année.
« Ayako T.3 » par Osamû Tezuka
Editions Delcourt (7,95 Euros)
C’est la conclusion, en apothéose, de ce superbe roman métaphorique (assez proche de la littérature russe mais aussi de «Dallas») : plus de 600 pages réalisées en 1972-73. Le lecteur est plongé dans les racines traumatiques du Japon contemporain, au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, assistant, médusé, à la dégénérescence d’une famille de riches propriétaires terriens. Ayako, née des amours incestueux du patriarche et de sa bru, a été enfermée pendant plus de 20 ans dans une cave. Trouvera t-elle sa place dans cette société en pleine mutation ?
« Poèmes de Rimbaud en bandes dessinées », collectif
Editions Petit à petit (14 Euros)
Tout en poursuivant leurs adaptations du répertoire immortel de certains chanteurs (Piaf, Gainsbourg, Higelin, Lapointe, Vian, Bourvil ou Dutronc), les éditions Petit à petit mettent aussi en BD les poèmes des plus grands auteurs littéraires. Après Baudelaire, Hugo, Maupassant et Verlaine, c’est au tour de Rimbaud d’être mis en images. L’exercice de style est convaincant : il permet la mise en valeur et la redécouverte de notre patrimoine poétique tout en donnant un sérieux coup de pouce à de nombreux jeunes talents. Dans ce nouveau recueil, en petit format cartonné, de 96 pages, on peut apprécier, entre autres, la maîtrise graphique de Loïc Godart, Nicolas Sure, Bertrand Hottin, Antoine Ronzon, Arnaud Bétend, Clod, Emmanuel Murzeau, Chandre, Sophie Chaumard…