On ne peut que saluer les qualités narratives et graphiques des « 5 Terres » : une série désormais culte. Les auteurs de la série se sont donnés les moyens de leurs grandes ambitions. Depuis 2019, l’intrigue complexe se développe sur cinq cycles de six albums chacun, portée par le magnifique dessin de Jérôme Lereculey. Entre le deuxième cycle qui vient de s’achever et le troisième qui débutera cet été, un récit complet vient s’intercaler : un spin-off intrigant autour du personnage emblématique du premier cycle : This Delliana, alias Demeus Lor.
Lire la suite...« Au fil de l’eau » par Juan Díaz Canales
Dans un Madrid contemporain marqué par la crise, quelques papys républicains devenus receleurs et vendeurs à la sauvette afin d’améliorer leur ordinaire se font assassiner, les uns après les autres. Qui donc peut bien s’en prendre à ces sympathiques vieillards escrocs et, surtout, pourquoi ? Voilà un roman graphique atypique et bien poisseux, souvent empreint d’une certaine distance et drôlerie, réalisé entièrement, textes et dessins, par le scénariste de « Blacksad » et de la reprise de « Corto Maltese » !
Cette bande de vieux copains octogénaires, qui ont eu leur enfance marquée par la Guerre civile et la répression franquiste, sait donc se débrouiller pour traficoter en amateur à gauche et à droite, depuis que des millions d’Espagnols se sont, comme eux, retrouvés sur le carreau après l’embellie des années 1990 et 2000. En effet, cette population paupérisée ne se limite pas à nos braves pépés en proie au doute existentiel, mais touche aussi leurs enfants, petits-enfants, amis et proches enlisés dans des préoccupations sociétales et financières. Mais aujourd’hui, en plus, voilà que les patriarches roublards se font décimer un par un, juste avant leur dernier tour de piste : bizarre autant qu’étrange, non ?
Rares sont ceux qui souviennent que ce fut d’abord Juan Díaz Canales qui mit en images un chat noir qui allait bientôt devenir célèbre, dans une bande dessinée animalière policière montrée à son copain Juanjo Guarnido au sein du studio d’animation madrilène Lapiz Azul où ils travaillaient tous les deux, en octobre 1990. Le scénariste de « Blacksad » était donc déjà dessinateur ! Il nous le rappelle aujourd’hui avec cette palpitante intrigue au final à contre-courant — et donc quelque peu déroutant… — où son précis et expressif graphisme en noir et blanc, très proche des styles d’Alberto Breccia, Will Eisner ou Carlos Giménez (il y a pire comme influence !) fait merveille.
Pratiquement cent pages où le talentueux auteur, lucide, développe une réflexion universelle sur le temps qui passe à travers cette belle chronique sociale aux relents de polar !
Gilles RATIER
« Au fil de l’eau » par Juan Díaz Canales
Superbe album que je viens de terminer. C’était ma prochaine chronique prévue ppur la boutique Nebular roannaise. On y revient donc bientôt aussi