Ayant envie d’une bande dessinée où il pourrait parler du rugby de son enfance dans le Sud-Ouest et qui soit dans la lignée de son « Magasin général » réalisé avec Régis Loisel — évocation du quotidien des habitants d’un petit village qui nous a transmis tant de baume au cœur ! —, Jean-Louis Tripp a proposé à Aude Mermilliod de la coécrire avec lui. Le triptyque « Les Vents ovales » est le résultat de cette belle collaboration et nous plonge, avec délices, dans la ruralité française des Trente Glorieuses. C’est une magnifique fresque humaine et sociale aux personnages attachants, à la fois drôle et émouvante, où le rôle des femmes est largement mis en avant : notamment dans ce premier tome de 120 pages dessinées avec talent par Horne, dont le trait précis et rigoureux s’adapte parfaitement à l’esprit aussi profond que léger du propos.
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S’il est un album peu bavard, mais qui nous parle beaucoup, c’est bien « Murmures des sous-bois » : où Poppy, la jeune héroïne, urbaine et accroc à son téléphone, découvre par hasard en promenant le chien de sa mère un environnement insoupçonné. Il suffit d’un trou dans une clôture où s’engouffre Pepper pour qu’elle découvre une forêt… et ses richesses.
Poppy est du genre ado scotchée à son portable et, à l’évidence, peu adepte des promenades en milieu naturel. Par chance, si l’on peut dire, sa mère déprime suite au décès de la grand-mère et Poppy se doit de sortir le chien, plutôt distraitement. Pepper, lui, est aux aguets : il renifle, observe et découvre un passage et un nouveau terrain de jeu. Loin derrière les barrières d’un chantier, une friche, des ruines, des carcasses automobiles, et la présence d’un garçon entrevu qui, lui, aime les arbres, les oiseaux…
Le deuxième de jour de balade, Poppy ne se fait pas prier pour en découvrir un peu plus et s’enfoncer avec son chien dans cette forêt inconnue où elle retrouve Rob qui va lui apprendre à observer, à écouter, à repérer des traces, à nommer les oiseaux, apprécier un écureuil… C’est le début de nouvelles échappées vers ce monde magnifique d’animaux en alerte, de plantes qui s’épanouissent, de parfums, d’odeurs, de sons…
Kengo Kurimoto, auteur de bande dessinée canadien vivant au Royaume-Uni, construit peu à peu, dans un format à l’italienne, un récit purement visuel, contemplatif s’il en est, honorant la nature et célébrant nos sens. On peut estimer qu’une telle morale est banale – elle l’est ! -, mais il est nécessaire de la répéter et l’artiste est très convaincant : le défilement des images dans les pas de son héroïne est incroyablement séduisant.
On ne la lâche pas d’une semelle, observant comme elle ici une chouette, là un blaireau, mais aussi, plus ordinaires, une grenouille, un escargot… Percevoir le monde qui nous entoure, cela s’apprend, mais il faut avant tout prendre le temps, ce que comprend peu à peu Poppy avec l’aide de son ami. Rien ne sert de courir, il faut observer à point !
Didier QUELLA-GUYOT
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« Murmures des sous-bois » par Kengo Kurimoto
Éditions Rue de Sèvres (18 €) – EAN : 9782810207732
Parution 20 mars 2024