Avant Noël, le retour à l’âge d’or de Mickey et Picsou…

Après un original premier diptyque remarqué par le public et la critique (1), Benoît Dahan et Cyril Liéron récidivent, en remettant en évidence l’incroyable perspicacité du célèbre détective britannique — créé par sir Arthur Conan Doyle — dans une nouvelle enquête inédite (« Le Cauchemar du loch Leathan »), laquelle va amener Sherlock Holmes au fin fond de l’Écosse. Une intrigante lettre anonyme, au propos décousu, ayant attisé sa curiosité, il entraîne son fidèle ami le Dr Watson sur l’île de Skye, dans une palpitante et inventive, voire brillante, aventure policière, où ses déductions particulièrement précises et pointilleuses vont certainement faire encore mouche !

Les éditions Glénat ont l’excellente idée de nous proposer, dans une nouvelle collection, un panorama des grands maîtres des studios Disney. Ainsi les récits les plus emblématiques de Mickey, Picsou et Donald sont réunis dans des albums conséquents de 200 pages consacrés à un seul personnage Disney. D’utiles textes de présentations introduisent chaque récit en y précisant le contexte et les innovations des auteurs les plus influents : de Floyd Gottfredson dans les années 1930 à Giorgio Cavazzano dans les années 2000. Les deux premiers albums de la collection « Les Âges d’or » sont consacrés à Mickey et Picsou.

Les éditions Glénat propose de (re)découvrir les plus beaux ou novateurs récits de trois personnages emblématiques des bandes dessinées des studios Disney. Des rendez-vous réguliers sont prévus dès maintenant avec la souris Mickey et les canards Picsou et Donald, sous forme de beaux albums cartonnés. Chaque récit est ainsi présenté de façon claire en expliquant l’apport de l’auteur et en le contextualisant dans la longue histoire des studios Disney.

Le nouveau regard de Mickey (1938)...

Prenons par exemple le premier volume de « Les Âges d’or de Mickey ». Il est composé de huit récits datés de 1938 à 1999. L’album propose un voyage fascinant sur six décennies d’aventure de la petite souris créée en 1928. À la lecture de l’ouvrage, on comprend que l’icône des studios Disney a toujours été en mouvement, retravaillée pour accompagner les changements d’époque. Ses scénaristes et dessinateurs l’ont continuellement réinventé par petites touches, afin qu’il apparaisse toujours en phase avec le monde tel qu’il existe à la date de parution des récits. Les histoires présentées dans l’album sont : « Mickey Mouse et Robinson Crusoé » de Floyd Gottfredson (1938), « Le Monde de demain » du même auteur (1944), « Les Fantômes de l’aéroport » de Bill Wright (1948), « Le Signe du calmar » (1955) et « Aventures en mer » (1961) de Paul Murry, « Mickey et les sapins de l’Himalaya » de Romano Scarpa & Giorgio Cavazzano (1962), « La Légende Guillaume Tell » de Ignasi Calvet Estéban (1998) et « 2 500 Mickey » de César Ferioli (1999).

Mickey change de costume...

Deux exemples de l’énergie créatrice des dessinateurs des studios Disney qui ont façonné un imaginaire qui influence toujours le monde de la bande dessinée. Dans les années 1930, Floyd Gottfredson a pris en main les aventures de la petite souris créée par Walt Disney en 1928 pour des dessins animés et des bandes dessinées. Un aspect du dynamique rongeur lui pose soucis : ses yeux ! En effet, ils sont, depuis l’origine, noirs et ovales en forme de « gâteaux entamés », ainsi nommés à cause des parts triangulaires découpés dans les pupilles. Or si le design en est efficace cela rend quasiment impossible aux animateurs la tâche d’orienter son regard à part devant lui. Gottfredson réussit le tour de force de modifier le regard de Mickey dans une courte histoire de 38 pages. Pour cela, il invente une mise en abyme en plaçant le tournage d’un film autour du naufrage de Robinson Crusoé au cœur de son récit. Mickey acteur change de physionomie quand il passe devant la caméra. Ainsi, la mise en abyme du comic-strip qui devient un film aide à présenter les nouveaux yeux de Mickey aux lecteurs. Son regard plus expressif sera l’une des raisons du succès du dessin animé « L’Apprenti-sorcier » intégré au long-métrage « Fantasia » en 1940.

« Les Âges d’or de Mickey T1 » page 99.

Autre exemple de l’évolution graphique et narrative de Mickey avec « Mickey et les sapins de l’Himalaya » de Romano Scarpa & Giorgio Cavazzano. Il est évident que la garde-robe de la célèbre souris s’est radicalement transformée au fil des années. Après ses débuts simplement vêtu d’un short, elle a très vite porté des pantalons longs et une chemise. Après 1945, Gottfredson a ajouté un blouson et un borsalino. Dans les années 1960, ses successeurs italiens Scarpa et Cavazzano ont commencé à tester des poses et des mises en place plus souples et plus avant-gardistes. Ils se sont appropriés le style Gottfredson. Le costume de Mickey a continué de se mouvoir de manière organique autour de son corps. Sa tenue fait partie intégrante de l’action et cela reste vrai jusqu’à aujourd’hui. Sur le travail de Romano Scarpa nous vous renvoyons à un ancien article : «Ce que Disney doit à Romano Scarpa… ».

Le Picsou de Carl Barks...

Picsou a aussi droit à un album de plus de 200 pages avec huit histoires étalées sur 60 ans de création : de « Noël sur le mont Ours » de son créateur Carl Barks (1947) à « Retour sur le mont Ours » de Giorgo Cavazzano en 2007. De quoi retracer le parcours inhabituel du canard le plus riche du monde, de son origine jusqu’à nos jours.

Ce personnage paradoxal d’une extrême avarice et toujours de mauvaise humeur a fini par conquérir l’affection de nombreux lecteurs.

On apprend que Carl Barks s’est inspiré pour le personnage de Picsou d’un célèbre récit de Noël avec un personnage du même nom : Scrooge (le nom anglais de Picsou), le héros d’« Un chant de Noël » de Charles Dickens. De quoi créer un personnage dont la première pensée publiée est : « Moi je suis différent ! On me déteste et je déteste tout le monde ! »

Nous vous conseillons le lecture de ces denses anthologies d’une fabrication élégante avec un appareil critique fort bien documenté avant chaque récit. Au-delà du simple panorama patrimonial, chaque album offre un aperçu éclairant de l’évolution graphique des héros Disney avec des histoires toujours ludiques qui plaisent autant à leurs premiers lecteurs, désormais d’un certain âge (!), qu’aux enfants du XXI^e siècle. L’âge d’or des héros de Disney n’est certes pas encore clôt, avec bientôt de nouvelles preuves avec les tomes 2 de la collection, dès février prochain.