« 13 h 17 dans la vie de Jonathan Lassiter » : une rencontre improbable !

Après le déroutant « Bertille & Bertille », situé dans les années folles, Éric Stalner propose une nouvelle histoire tout aussi insolite au cœur de l’Amérique des sixties. Une fois encore, il intrigue ses lecteurs en imaginant la rencontre de deux personnages que tout sépare. Le récit, décalé et haut en couleur, flirte avec des événements aux frontières du fantastique. Voici un one-shot à la lecture agréable, qui devrait séduire les amateurs de polars classiques et d’aventures insolites.

Nous sommes à Keanway — ville sinistre de 23 752 âmes au Nebraska —, au milieu des années 1960. En ce jour de septembre 1966, Jonathan Lassiter, un jeune homme sans grande ambition, s’apprête à connaître les heures les plus étranges de sa courte existence : un soir d’orage, tout juste plaqué par Helen, sa fiancée, il est renvoyé sans explication du cabinet d’assurance Maxwel et Fils qui l’emploie. Bien décidé à noyer ses échecs dans l’alcool, il franchit la porte du Mike’s Bar. C’est là qu’il est abordé par l’élégant et riche Edward : un homme distingué et cynique, imbibé par les consommations et qui distribue les dollars sans compter. L’inconnu lui propose de tenir — le temps d’une nuit — le rôle de chauffeur.

À bord d’une somptueuse Cadillac, commence alors une errance nocturne qui conduit les deux hommes depuis la fastueuse demeure d’Edward jusqu’au Select : une boîte de nuit dont il fut le propriétaire avant de la céder à Max, son ancien et sulfureux associé. Filés par Bill (un ancien flic ripou), traqués bien malgré eux par John et Jack — deux reptiles à sang froid chargés de liquider Edward —, les deux nouveaux compères vont vivre très précisément 13 heures et 17 minutes pour le moins agitées. D’autant plus que, comme dans tout bon roman noir qui se respecte, l’inévitable femme fatale n’est jamais très loin…

Après « Bertille & Bertille », publié l’an dernier sous le même label, Éric Stalner abandonne une fois encore ses thèmes récurrents pour commettre un nouveau récit mêlant charme et sensibilité ; sans oublier une note d’humour, au service d’une histoire noire au scénario millimétré. Le trait est plus souple, les couleurs — discrètes — limitées à une bichromie qui ajoute une note sombre et les décors soignés, tout au long des 100 pages de cet album, dont on savoure chacune.

Né à Paris le 11 mars 1959, Éric Stalner se lance dans la bande dessinée en 1989, avec son frère aîné Jean-Marc. Le duo signe à quatre mains « Les Poux », « Le Boche », « Fabien M », « Malheig » et enfin « Le Fer et le feu » : leur dernière série commune. Éric — tout comme Jean-Marc — poursuit seul ou avec un scénariste (Pierre Boisserie, son fils Cédric…) une riche carrière où se pressent des dizaines d’ouvrages plus volontiers tournés vers l’Histoire et le fantastique : « Voyageur », « La Croix de Cazenac », « La Liste 66 », « La Zone », ou encore des adaptations de Zola… Et surtout la série« Le Roman de Malemort », qui demeure pour votre serviteur son œuvre la plus aboutie.

Henri FILIPPINI

« 13 h 17 dans la vie de Jonathan Lassiter » par Éric Stalner

Éditions Grand Angle (19,90 €) — EAN : 978-2-8189-9880-9

Parution 31 mai 2023

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